Voilà plus d’un an qu’Anticor n’avait plus son agrément lui permettant de se constituer partie civile dans les procès politico-financiers en raison d’une mauvaise rédaction de l’arrêté signé en 2021 par Jean Castex. Depuis, Anticor se battait au quotidien pour récupérer cette arme citoyenne. Le tribunal administratif de Paris a estimé ce 12 août que le gouvernement devait réexaminer la demande d’agrément dans un délai de 15 jours …
Agrément d’Anticor : l’association remporte une première victoire judiciaire face au gouvernement
Un article publié le 12 août 2024 par Libération et AFP…
Premier soupir de soulagement pour Anticor. Depuis fin 2023, l’association de lutte contre la corruption demande au gouvernement la permission de récupérer son agrément. Avant de lui être retirée en juin 2023, cette disposition lui permettait d’intervenir dans des procédures judiciaires, dont les dossiers politico-financiers, notamment en se constituant partie civile en cas d’inaction du parquet. Problème : l’exécutif n’a jamais répondu à ses requêtes. Un refus implicite que le tribunal administratif de Paris a suspendu, ce lundi 12 août. La juridiction «enjoint au Premier ministre de réexaminer la demande d’agrément de l’association Anticor dans un délai de quinze jours», écrit l’instance dans un communiqué.
Dans le détail, le tribunal estime que, par son silence, le gouvernement réduisait à «deux seulement le nombre d’associations agréées», Sherpa et Transparency International. Un nombre trop faible qui «portait atteinte de manière suffisamment grave et immédiate à l’intérêt public qui s’attache à la lutte contre la grande délinquance économique et financière».
C’est une formidable victoire», a réagi auprès de l’AFP le président de l’association Paul Cassia. Tout en saluant une décision qui «reconnaît de manière générale l’importance du rôle des associations anticorruption, et au cas d’espèce celui d’Anticor».
Une joie partagée par l’avocat de l’association, Vincent Brengarth, qui toutefois s’estime peu surpris : «C’est une première victoire qui était attendue face à une situation d’illégalité totale». D’après le conseil, peu de doute quant à la prochaine étape : «Le réexamen doit conduire à la délivrance de l’agrément étant donné que les conditions posées par la loi sont remplies».
Gouvernement qui ne dit mot… ne consent pas
Pour rappel, l’association, fondée en 2002 «pour lutter contre la corruption et rétablir l’éthique en politique», a perdu son agrément en juin 2023, après une décision du tribunal administratif. Deux dissidents avaient saisi la justice, estimant que la procédure de renouvellement était irrégulière et qu’Anticor ne remplissait pas les conditions exigées pour obtenir l’agrément dont elle bénéficiait depuis 2015.
En novembre 2023, la cour administrative d’appel avait confirmé l’annulation d’un arrêté signé en avril 2021 par Jean Castex, Premier ministre à l’époque, qui renouvelait pour trois ans cet agrément.
Anticor, qui revendique 7 000 adhérents, avait déposé dès juin 2023 une nouvelle demande pour le récupérer. Mais à expiration du délai de six mois, fin décembre 2023, la ministre des Affaires étrangères Catherine Colonna, à qui avait été confié le dossier après le déport du ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti puis de l’ancienne Première ministre Élisabeth Borne, n’avait pas répondu. Ce qui équivalait à un refus implicite.
L’association avait contesté devant le Conseil d’Etat l’annulation de son agrément et devant le tribunal administratif l’absence de réponse du gouvernement. Ces deux procédures sont toujours en cours. En outre, elle avait déposé une nouvelle demande d’agrément, réceptionnée le 25 janvier. Mais une fois encore, l’exécutif n’avait pas répondu dans le délai imparti et aucune décision n’avait été publiée le 26 juillet au Journal officiel. Matignon avait expliqué à l’AFP attendre l’issue de la procédure devant le Conseil d’Etat avant de se prononcer.
Des arguments «vides» du côté du gouvernement ?
Anticor avait saisi en référé, c’est-à-dire en urgence, le tribunal administratif pour obtenir l’annulation de cette décision. Lors de l’audience, le 7 août, Paul Cassia, avait insisté sur le «préjudice gravissime en termes d’image, en termes financiers et en termes de procédures» que représentait l’absence d’agrément. Il avait également dénoncé l’absence du gouvernement, ni présent ni représenté à l’audience, et le «vide» de son mémoire dans lequel il demandait le rejet de la requête de l’association.
Paul Cassia avait assuré qu’Anticor remplissait «les conditions pour se voir remettre son agrément». Il avait détaillé les modifications apportées aux «deux conditions qui pourraient être problématiques» – le caractère désintéressé et indépendant de son financement et son fonctionnement. Un point que rejoint le tribunal administratif de Paris. Dans sa décision rendue ce lundi, il considère que «le Premier ministre n’a pas indiqué […] les motifs qui l’ont conduit à refuser la délivrance de l’agrément» alors que l’association remplit les cinq critères requis pour obtenir l’agrément. Pour l’instant, Matignon est silencieux sur le sujet.
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