Et en plus ils dansent …

« Et en plus ils dansent ! « , tel est le titre du documentaire réalisé par Kenan An Habask et Thierry Salvert . Quatre personnalités du milieu culturel breton relatent leurs difficultés à dévoiler leur homosexualité et racontent  la solidarité et le soutien reçus dans le mouvement des cercles celtiques. Un dossier à consulter sur le site Kub réalisé en partenariat avec le Mois du film documentaire 2023.

Ce film est une prise de parole, un besoin d’affirmer qu’être soi est possible. Parce qu’en 2023 il n’est toujours pas facile, évident, normal, d’être homosexuel.  Une bande annonce de 0’47″produite par FR3 Bretagne …


Ce documentaire vidéo de 52′ est à voir en intégralité et gratuitement jusqu’au 12/02/2024 sur le site de KUB, c’est par ici …

Et en plus ils dansent commence par un cérémonial : la transformation des corps enluminés par des costumes de scène. Le travestissement semble être le truchement par lequel les gays ont trouvé leur place dans les cercles celtiques qui réunissent musiciens et danseurs. Le travestissement comme manière de répondre au sourd besoin d’être un autre, d’échapper aux canons de la virilité très tôt suggérée aux garçons. Ce que racontent les quatre personnages c’est que, dans ces groupes, ils ont trouvé le moyen d’échapper au conformisme social, de bifurquer avec l’aide des femmes, plus bienveillantes, plus tolérantes.
Thierry Salvert et Kenan an Habask conduisent leurs témoins à détailler leur cheminement, depuis les premiers émois aux étapes successives du coming-out. Circonvolutions qui disent les réticences quand ce n’est l’hostilité de la société envers les homosexuels, une société qui évolue toutefois, avec l’arrivée de générations pour qui l’identité sexuelle est un domaine qu’ils entendent investir chacun.e à sa manière. >>> un film produit par Laurence Ansquer, Tita Productions


« Et en plus ils dansent ! » : à Châteauneuf-du-Faou, Tristan Gloaguen se livre sur son homosexualité

Un article paru dans Le Télégramme du

Le cercle Danserien Ar C’Hastell Nevez organise la projection du documentaire « Et en plus ils dansent ! », jeudi 13 avril, dans lequel quatre hommes abordent la question de leur homosexualité dans les cercles celtiques. Le Châteauneuvien Tristan Gloaguen témoigne.

 

Personnage central du documentaire, Tristan Gloaguen interviendra lors de la soirée projection du film « Et en plus ils dansent ! ».
Personnage central du documentaire, Tristan Gloaguen interviendra lors de la soirée projection du film « Et en plus ils dansent ! ».

Organisée par Tita Productions et les Danserien Ar C’Hastell Nevez, la projection du film « Et en plus ils dansent ! » aura lieu ce jeudi 13 avril 2023 à 19 h, à la salle Ar Sterenn (gratuit). Le documentaire met en lumière quatre personnalités du milieu culturel breton, relatant leurs difficultés à dévoiler leur homosexualité. Réalisé par Kenan An Habask et Thierry Salvert, il présentera les témoignages de Pascal Jaouen, brodeur et styliste renommé, Gildas Sergent, marin-cuisinier à la retraite, Jonathan Le Guennec, salarié de la confédération Kenleur, et du Châteauneuvien Tristan Gloaguen, co-directeur de la Confédération Kenleur.

Professeur de danses pendant 25 ans

Cela fait 25 ans que Tristan Gloaguen apprend les danses bretonnes aux Danserien Ar C’Hastell Nevez. Musicien, il a aussi fait partie de plusieurs groupes. Il aborde sans difficulté son parcours dans le milieu des cercles celtiques. « Aujourd’hui, mon homosexualité est devenue un non-sujet », note-t-il.

Ma mère a commencé à critiquer les opposants au mariage pour tous. Quand j’ai compris qu’elle soutenait les mariages gays, j’ai rebondi sur le sujet, avouant ce que je taisais depuis longtemps

Mais ce ne fut pas toujours le cas. Après avoir fait ses premiers pas de danses à 13 ans dans un cercle celtique dirigé par Iffig Cloarec, il progresse dans la pratique, découvrant un milieu qu’il adore. « J’ai senti assez tôt que j’étais différent, avoue-t-il. Le milieu de la culture bretonne peut présenter une apparence stricte. Ce n’est pas le cas. J’y ai trouvé une grande bienveillance. Je me suis senti à l’aise et j’ai dévoilé progressivement mon homosexualité. Le plus dur a été de la révéler à mes parents. J’avais peur qu’ils me rejettent. Je l’ai fait l’année de mes 33 ans, il y a dix ans ».

« J’ai avoué ce que je taisais depuis longtemps »

Cette période de sa vie est aussi celle de l’adoption du mariage pour tous et des manifestations qui en ont découlé. « Les manifestations anti-mariage pour tous défilaient à la télévision. Ma mère a commencé à critiquer les opposants au mariage pour tous. Quand j’ai compris qu’elle soutenait les mariages gays, j’ai rebondi sur le sujet, avouant ce que je taisais depuis longtemps. J’avais craint leur rejet à tort. Ma famille m’a accepté. J’ai vraiment eu beaucoup de chance ! »


« Je pouvais être moi à la Kerlenn Pondi » : Jonathan Le Guennec se livre dans un film documentaire

Un article signé Lucie Diat dans Le Télégramme du <

Originaire de Locmalo, Jonathan Le Guennec a participé à un film documentaire sur les personnes homosexuelles dans les cercles celtiques, « Et en plus, ils dansent ! ». Le trentenaire est revenu sur les raisons qui l’ont poussé à prendre la parole face caméra.

Chorégraphe pendant dix ans à la Kerlenn Pondi, Jonathan Le Guennec a témoigné dans le film documentaire « Et en plus, ils dansent ! », sur les personnes homosexuelles dans les cercles celtiques.
Chorégraphe pendant dix ans à la Kerlenn Pondi, Jonathan Le Guennec a témoigné dans le film documentaire « Et en plus, ils dansent ! », sur les personnes homosexuelles dans les cercles celtiques. (Le Télégramme/Lucie Diat)

Comment avez-vous été contacté pour participer au film documentaire « Et en plus, ils dansent ! » ?

J’ai été approché par la production car j’ai été chorégraphe pendant dix ans à la Kerlenn Pondi. Je me suis déplacé à Quimper, nous étions une vingtaine de personnes présentes. Nous passions des entretiens sans caméra durant lesquels on racontait toute notre vie. Nous sommes finalement quatre à témoigner dans le film. Le fil conducteur du documentaire est Yann-Fañch Kemener, une figure gay du milieu breton.

Parler face caméra de sujets intimistes, cela n’a pas été trop intimidant ?

Un peu, j’ai un regard et un sourire gênés quand je parle dans le documentaire (rires). Mais je suis ravi de l’avoir fait. C’est important de montrer que malgré les apparences, malgré la séparation genrée avec nos costumes dans la danse et les clichés virils du bagad, j’ai été accepté avec une grande bienveillance. Puis le film m’a poussé à faire mon coming out à mes parents.

Comment ça ? Le film a-t-il été le déclic ?

Quand j’ai dit oui pour le film, je n’ai plus eu le choix de dire à mes parents que je suis homosexuel. J’ai préparé un message que je leur ai envoyé. J’ai eu peur de leur réaction, alors que j’avais 28 ans quand c’est arrivé. Aujourd’hui, ça va. Mais petit, je me suis demandé pourquoi je ne suis pas comme les autres. Ça a été dur de ne pas pouvoir en parler. La Kerlenn a été mon échappatoire. Je pouvais être moi dans le cercle.

Il m’a aussi permis d’éviter les repas de famille avec les traditionnelles questions : « Les amours ? », « Alors tu as une copine ? », etc. D’autant plus que j’avais des responsabilités, c’était facile de dire que j’étais trop occupé pour penser à ça, que la danse me prenait trop de temps pour que je m’occupe de ma vie amoureuse.

Parler de la présence de la communauté LGBTQI + dans les cercles en votre nom, c’était important ?

Avoir des modèles, des personnes comme soi qui ont réussi, c’est essentiel. Yann-Fañch Kemener a été l’artiste qui m’a le plus inspiré. Je me suis dit que s’il a réussi dans la danse bretonne, pourquoi pas moi ?

Témoigner dans ce film me permet aussi de me sentir utile. Si je peux aider des jeunes avec mon histoire, qu’ils se sentent représentés, c’est le principal. Le documentaire permet également de sortir des clichés. Être gay, ce n’est pas être exubérant ou être la grande folle. Chacun a le droit d’être comme il le souhaite.

Avez-vous vu le film avant sa diffusion ?

J’ai juste vu un pré-montage, le suspense reste entier. La projection est suivie d’un débat auquel je participe pour échanger avec le public et être sûr que le message a bien été compris. Le sentiment de rejet des jeunes homosexuels est encore la deuxième cause de leur passage à l’acte lors d’un suicide. Il est important que cela change. Peu importent nos passions, nos orientations sexuelles, on veut juste vivre.


Comment les homosexuels se sont épanouis au sein des cercles celtiques

 Un article de Rodolphe Pochet paru dans Le Télégramme du

Loin des clichés d’une Bretagne conservatrice qu’ils peuvent renvoyer, les cercles celtiques ont su accueillir des hommes homosexuels en quête de tolérance, d’un refuge. Quatre d’entre eux témoignent dans un film, « Et en plus ils dansent ».

Photo d’illustration.
Photo d’illustration. (Photo archives Francois Destoc/Le Télégramme)

« Sur scène ou dans le défilé, c’est un garçon et une fille en costumes, main dans la main, comme une image figée de la Bretagne éternelle. Mais alors, en coulisses, c’est tout autre chose… » L’humour n’est jamais loin avec Gildas Sergent, figure gouailleuse de Douarnenez et membre du cercle des Korriged Is.

Ce jour-là, pourtant, pour présenter le film « Et en plus ils dansent », dans lequel il témoigne, le ton est plus grave. « Au sein du cercle, pas question de cacher mon orientation sexuelle, bien au contraire : la parole est libre, on en rigole. En dehors, on la masque en partie ou totalement, alors le dire publiquement dans un film, c’est quand même une montagne », confie-t-il. Un coming out, et une libération. La parole forte qu’il livre, comme celle de trois autres témoins réunis dans ces 52 minutes, offre des moments intenses.

« Ce n’est pas au foot qu’on pouvait s’assumer »

Produit par la société douarneniste Tita Productions, « Et en plus ils dansent » aborde un sujet jusque-là jamais évoqué : l’homosexualité masculine au sein des cercles celtiques. Des lieux de création, d’ouverture, de danse, qui sont apparus à des garçons et à des hommes comme des refuges pour s’affirmer et s’épanouir dans la Bretagne rurale. « Ce n’est pas au club de foot, ni même au bagad, que l’on pouvait assumer sa différence », reprend Gildas Sergent.

Thierry Salvert, Gildas Sergent, Kenan an Habask et Laurence Ansquer dévoilent un film qui marque les esprits.
Thierry Salvert, Gildas Sergent, Kenan an Habask et Laurence Ansquer dévoilent un film qui marque les esprits. (Le Télégramme/Rodolphe Pochet)

Au cours d’une enquête lancée en 2018, les réalisateurs Kenan an Habask et Thierry Salvert ont longuement rencontré quatre acteurs du monde des cercles celtiques. « Nos personnages qui ont accepté de parler ne sont pas des militants de la cause : il s’agissait de mettre des mots sur un phénomène ressenti depuis des décennies au sein des cercles, cette présence marquée d’homosexuels qui est l’un des facteurs de leur dynamisme », indique Kenan an Habask.

« Un mouvement de fond »

Les quatre hommes racontent leurs douleurs, l’annonce aux proches, la violence des propos, la tolérance trouvée dans leur groupe… On entend, aux côtés de Gildas Sergent, le brodeur Pascal Jaouen, le metteur en scène au cercle celtique de Pontivy Jonathan Le Guennec, et le codirecteur de la confédération Kenleur, Tristan Gloaguen. « Cela a été très dur pour lui d’annoncer son orientation sexuelle au sein d’une famille catholique et conservatrice, et aujourd’hui, il s’apprête à présenter le film devant tous ses danseurs à Châteauneuf-du-Faou. La prise de parole est une épreuve qui peut faire du bien », note Laurence Ansquer, de Tita Productions.

À côté de ces solidarités, les auteurs rappellent l’augmentation des actes homophobes, le suicide du jeune Lucas, en début d’année. « Les cercles celtiques ont eu réellement un effet salvateur pour des homosexuels », signale Thierry Salvert. Qui voit avec enthousiasme le monde celtique s’ouvrir au film : une projection est prévue au prochain Tradi’Deiz de Vannes, une autre au Festival Interceltique de Lorient. « Ce film participe à un mouvement de fond sur ce que l’on veut faire de la culture bretonne, signale Gildas Sergent. C’est une étape qui dessine le visage des cercles celtiques des années 2030 ».