Une pub pour le vélo interdite en France …

Le fabricant néerlandais de vélos électriques Vanmoof a dénoncé mardi 30 juin un avis de l’autorité française de régulation de la publicité lui demandant de modifier un spot jugé anti-voiture. En cause : des plans montrant des « images anxiogènes » de la voiture. Une affaire qui s’inscrit dans un contexte de questionnement du rôle de la publicité dans la transition écologique …

En France, VanMoof ne pourra pas diffuser sa publicité à la télévision. En cause : elle donnerait une vision « anxiogène » du secteur automobile, pourtant responsable de 60 % de la pollution liée aux transports sur route en Europe …
A en juger vous même … Une vidéo de 45″.

Le vélo est-il en train d’effrayer les constructeurs automobiles ? En tout cas, la dernière campagne publicitaire de VanMoof, constructeur hollandais de vélos électriques, n’est pas au goût de l’Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité (ARPP). Ce spot qui met en avant les nouveaux Electrified S3 et X3 ne fait pas dans la métaphore : il présente une succession de scènes mettant en avant les problèmes de la voiture. Embouteillage, accident, pollution : les scènes s’enchaînent dans les reflets chromés d’un véhicule. Il finit par fondre pour se transformer en vélo.

Pour l’ARPP, elles posent problème : « Certains plans présents dans les reflets de la voiture apparaissent, à notre sens, disproportionnés et jettent un discrédit sur tout le secteur de l’automobile en le mettant seul en cause : plan d’usines/cheminées et d’accident (voiture retournée/sirènes) tout en créant un climat anxiogène », peut-on lire dans une lettre adressée à VanMoof et consultée par Numerama. La décision de l’Autorité est donc de demander à VanMoof de modifier sa vidéo pour qu’elle soit diffusée à la télévision française. Ce qui montre en creux l’absence de ligne directrice entre les médias : sur les réseaux sociaux, cette publicité publiée le 6 juin tourne en boucle.

Pourquoi cette publicité pour un vélo a-t-elle été interdite de diffusion en France?

 30 juin 2020
Des voitures qui polluent… remplacées par un vélo électrique: voici l’idée générale de la nouvelle publicité de VanMoof, un fabricant hollandais. Pourtant, ce spot ne sera pas diffusé à la télévision: l’Autorité de régulation de la publicité a émis un avis défavorable quant à sa diffusion en France.

La publicité peut-elle dire l’urgence écologique ?

Mais pour Ties Carlier, co-fondateur de VanMoof, cette décision française passe mal. L’entrepreneur s’interroge, dans un billet de blog publié pour rebondir sur la censure française : « Les constructeurs automobiles sont autorisés à passer sous silence la question de leur impact environnemental, mais lorsque quelqu’un conteste cette situation, il voit la diffusion de sa campagne refusée ? » Alors que l’urgence environnementale est au cœur des enjeux humains et pénètre petit à petit dans les décisions nationales ou à l’échelle des villes, la question de Carlier peut trouver un écho. D’autant qu’elle est appuyée par des faits : en Europe, 30 % des émissions de gaz à effet de serre viennent des transports. Et dans la tranche des transports routiers, la plus largement pollueuse, la voiture occupe 60,7 % du total, notamment à cause de l’absence d’autopartage ou de covoiturage généralisés.
La base du reproche énoncé par l’ARPP est fondée sur l’interdiction de « l’exploitation du sentiment de peur ou de souffrance dans les communications commerciales  » et il est vrai que la publicité de VanMoof est une communication qui ne fait pas dans la demi-mesure. Le constructeur hollandais rappelle que Greenpeace avait été censurée pour les mêmes raisons et n’avait pas manqué de critiquer cette décision. La campagne était censée montrer que les paroles ne suffiraient plus pour sauver l’environnement, et qu’il faudrait des actes.

Reste à l’Autorité la tâche de contrôler les dérives du greenwashing, consistant à vendre de l’écologie là où il n’y a que du marketing — mais ce n’est pas, dans ce cas, le reproche qui est formulé.

L’un des plans censuré // Source : Capture d’écran Numerama


Le but de notre dernier film promotionnel était bien de soulever des questions et d’inspirer certaines réflexions. Mais l’Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité (ARPP) a décidé que le film ne pouvait pas être diffusé en France parce qu’il crée « un climat d’anxiété ». Vraiment, est-ce que montrer une voiture en train de fondre dans un spot publicitaire de trente secondes est devenu trop provocant pour la télé française ?

Essayons de prendre un peu de recul. Pour ceux qui ne connaissent pas l’univers de l’e-biking par cœur, notre film « Réflexions » porte un regard mélancolique sur la mobilité du passé, faite d’autoroutes embouteillées et de métros bondés vus dans le reflet d’une carrosserie de voiture. Alors que la bande-son chante « a new day dawning » (« L’aube d’un nouveau jour »), la surface brillante du véhicule commence à gondoler et à se déformer, fondant en une flaque de métal liquide. Pas besoin de vous faire un dessin – c’est bien un VanMoof S3 qui apparaît à la place de la voiture, juste avant le noir final.

C’est une séquence visuellement captivante, et une prise de position sans parole mais puissante pour notre futur. En utilisant à revers l’imagerie d’une publicité pour voiture, nous montrons un monde dans lequel les gens sont libres de choisir un moyen de transport différent, qui soit bénéfique à leur environnement comme à eux-mêmes. Malheureusement, l’ARPP, organisme auto-régulateur, affirme que certains aspects du film « discréditent le secteur automobile (…) tout en créant un climat d’anxiété », et a interdit sa diffusion à la télévision française.

Étant donné que l’organisme de réglementation s’est récemment engagé à renforcer dans son arbitrage les principes de développement durable, cette décision semble difficile à justifier. C’est particulièrement déroutant si l’on considère que les images que l’on voit en reflet n’ont pas été créées pour cette publicité mais appartiennent au domaine public. Si des images documentaires des transports quotidiens sont à même de susciter « un climat d’anxiété », peut-être que quelqu’un devrait essayer d’améliorer quelque chose dans ce monde. Par exemple… en proposant des moyens de transport alternatifs… ou quelque chose comme ça.

Ce n’est pas la première fois que l’ARPP prend des décisions controversées. Plus tôt cette année, elle a interdit une campagne de mobilisation de Greenpeace. Apparemment, des images de glaçons en forme de lettres capitales qui fondent ont été jugées « trop politiques » pour les utilisateurs du métro. De la même manière, une série d’affiches de Médecins du monde soulignant les coûts astronomiques des médicaments essentiels avait été interdite à cause du « risque de réaction négative de la part de l’industrie pharmaceutique ».

Vous remarquez une certaine tendance ? Nous ne sommes pas très portés sur la théorie du complot, mais l’ARPP s’est montrée encline à favoriser les intérêts des grandes entreprises au détriment d’un changement de société significatif. Leur opposition à notre publicité se fait à un moment où l’industrie de l’automobile se trouve en réelle difficulté. Les ventes de voiture s’effondrent, et le gouvernement français a été obligé d’injecter 8 milliards d’euros dans un plan de soutien au secteur.

Au même moment, les mesures persistantes de distanciation physique nourrissent la demande d’e-bikes. Alors que, de plus en plus, le vélo est considéré comme une option fiable comparé aux transports en commun, l’urbanisme parisien multiplie les initiatives cyclistes et a dédié 300 millions d’euros de budget aux infrastructures cyclables.

Il est facile d’imaginer que les constructeurs automobiles puissent craindre ce changement dans les comportements. Et il reste aux géants de l’industrie automobile assez d’influence et de puissance financière pour faire du lobbying sur les organismes de contrôle comme l’ARPP. Cela pourrait expliquer pourquoi, aujourd’hui, il n’y ait quasiment pas de spots publicitaires pour des vélos dans le monde. Mais cette mainmise sur le marché est en train de se relâcher, et ce n’est qu’une question de temps avant que davantage de voix ne puissent se faire entendre. En effet, nous sommes à l’aube d’un jour nouveau.