Histoire : l’épisode méconnu des 1 500 Antillais déportés à Brest

En 1802, Napoléon Bonaparte restaure l’esclavage. Haïti s’embrase, Napoléon envoie une expédition de 30 000 hommes, commandée par son beau-frère, le général Leclerc qui y perdra la vie. Sur place, la répression est terrible, les « rebelles » sont déportés vers l’Europe.  C’est ainsi que , dans des conditions effroyables, 1 500 prisonniers antillais, Haïtiens et Guadeloupéens, arrivent à Brest dans un camp de triage …

Histoire : l’épisode méconnu des 1 500 Antillais déportés à Brest

Un article de Erwan Chartier-Le Floch paru dans Le Télégramme du 13 septembre 2020

On ne dispose que de très peu de sources historiques sur cet épisode. Les contacts avec ces prisonniers antillais arrivés à Pontanézen ont volontairement été réduits au minimum avec les Bretons.

On ne dispose que de très peu de sources historiques sur cet épisode. Les contacts avec ces prisonniers antillais arrivés à Pontanézen ont volontairement été réduits au minimum avec les Bretons. (Illustration Gildas Java)

Alors que la mémoire coloniale française revient régulièrement dans l’actualité, un épisode méconnu, celui de 1 500 insurgés antillais déportés à Brest en 1802, révèle le caractère raciste du régime napoléonien.

C’était l’une des promesses les plus généreuses de la Révolution française, l’abolition de l’esclavage, particulièrement dans ses colonies d’Amérique. Depuis le XVIe siècle, la Guadeloupe et la Martinique ont été des possessions françaises, où l’on importe des esclaves africains pour travailler dans les champs de canne à sucre. Les traversées de l’Atlantique ont lieu dans des conditions épouvantables.

Mais, aux XVIIe et XVIIIe siècles, la perle de l’empire colonial français est l’île de Saint-Domingue, particulièrement sa partie occidentale qui deviendra par la suite Haïti. Elle produit une grande partie du sucre consommé en métropole. Là aussi, de nombreux esclaves africains ont remplacé les Indiens massacrés par les Européens. Colbert met au pas les boucaniers et les flibustiers et instaure le « code noir » pour régir les esclaves …

La suite de cet article de Erwan Chartier-Le Floch est réservée aux Abonnés du Télégramme…


Lire par ailleurs  …
Le « camp des nègres » de Pontanézen

Un article extrait du site internet « une-autre-histoire.org »

 

Les anciennes casernes de Lambezellec-Pontanézen (Finistère), au nord de Brest, servaient au XVIIIe siècle à l’accueil des bagnards en transit avant leur installation définitive au bagne de Brest.

 

Elles furent utilisées à partir du printemps 1802 et surtout pendant l’automne et l’hiver 1802-1803, comme un camp de triage pour les déportés des Antilles débarqués à Brest. Ces déportés, qui n’étaient pas moins de 1500 – dont au moins 800 Guadeloupéens – étaient des prisonniers qu’on n’avait pas eu le temps ou les moyens d’exécuter sur place. On n’avait à leur reprocher que leur couleur.

Les casernes n’étant pas chauffées, et les déportés n’ayant pas de vêtements, la mortalité fut effrayante et permit de « sélectionner » les plus résistants.

Bonaparte voulait éviter à tout prix que les déportés ne soient en contact avec la population, par racisme, par peur que les Français, et particulièrement les opposants républicains à sa dictature, ne s’aperçoivent que ces « sauvages » étaient pour la plupart instruits et bien entendu de peur que les déportés ne puissent dire que la colonie de Saint-Domingue était en passe d’être perdue.

Il donna personnellement des ordres pour que ces déportés soient transférés en Corse, à l’île d’Elbe (camp de Porto Ferrajo) ou à Mantoue pour être employés aux fortifications.

« Je porte le plus grand intérêt, écrit-il le 18 avril 1802, à ce que Brest et les environs soient purgés de ces individus ».

Aucun de ces déportés, dont beaucoup moururent dès les premiers mois, ne devait revoir son île natale. À la fin de l’Empire, ils avaient tous disparu sans laisser de trace.

Les anciennes casernes de Pontanézen existent toujours et sont occupées par la gendarmerie. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’aucun effort n’a été fait par la France, y compris depuis le vote de la loi Taubira, pour faire de ce camp un lieu de mémoire.


1er avril 1802 : au départ de Brest, Napoléon envoie des troupes militaires en Guadeloupe pour mater les velléités autochtones…

En Guadeloupe, la première déclaration d’abolition de l’esclavage par la Révolution de 1789 libéra les luttes d’un peuple jusque-là durement opprimé. La période 1789 – 1802 fut marquée par une grande effervescence sociale et l’apparition de leaders tels que Delgrès, Ignace… qui combattirent pour la liberté et moururent pour elle. Le 1er avril 1802, une expédition de 3 410 hommes, commandée par le général Richepance, appareillait de Brest : c’est la guerre pour le rétablissement de l’esclavage en Gouadeloupe.

Le 1er avril 1802, une expédition de 3 410 hommes, commandée par le général Richepance, appareillait de Brest. Elle comprenait des soldats aguerris et quelques-uns de ceux qui deviendront les meilleurs officiers de Napoléon. Après avoir imposé sa loi aux monarques d’Europe et colonisé l’Egypte, la France lançait sa plus grande expédition maritime pour briser la volonté d’indépendance des Antillais. L’épopée Delgres, c’est une page de la résistance du peuple guadeloupéen et un chapitre peu connu de l’histoire napoléonienne.

Connaître ce qui suivit…

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Le 28 mai 1802, soit 8 ans après avoir été aboli par la Convention, l’esclavage est rétabli en Guadeloupe après de violents combats. En cette même année l’armée de Napoléon tente en vain de rétablir l’esclavage en Haïti. En Guyane l’abolition de 1794 est abrogée en 1802, tandis que la Martinique redevient colonie française après une occupation britannique, et donc une continuité du système imposé au peuple noir déporté d’Afrique par les puissances esclavagistes européennes aux Amériques.

En Guadeloupe, dirigés par le Commandant Joseph IGNACE (né à la Guadeloupe) et le Colonel Louis DELGRES (né à la Martinique), des militaires noirs aidés par la population guadeloupéenne, résistèrent héroïquement pendant près d’un mois à 4.000 militaires français envoyés par Napoléon Bonaparte pour rétablir l’esclavage en Guadeloupe. A leur tête, deux hommes, les généraux Richepance et Gobert qui n’hésitèrent pas à éliminer près de 6.000 Guadeloupéens (morts aux combats, pendus, fusillés et déportés), soit 6% de la population guadeloupéenne de l’époque …


Max Relouzat, Fondateur de l’Association finistérienne « Mémoires des Esclavages » milite depuis 20 ans pour la vérité historique  …

Max Relouzat. photo : V. BrodPetit-fils d’esclave, il est né le 15 janvier 1945 à Fort de France en Martinique, dans une famille de sept enfants, câliné par une mère « magnifique » et houspillé par un père exigeant. L’école jusqu’à 13 ans et demi est vécue comme un répit dans une jeunesse contrariée par les travaux des champs. Maître ouvrier principal, puis cuisinier, il est aujourd’hui retraité des Hôpitaux. Portrait complet à retrouver en ligne sur le site internet de l’association Mémoires des Esclavages par ici …

Max Relouzat ne manque jamais une occasion dede rendre leur dignité aux 1500 combattants antillais emprisonnés à Brest ….

Comme ici lors  de l’entretien diffusé le 13 juin 2020 par Tébéo. ( extrait de 2’30″»


En savoir plus sur les actions menées à Brest par l’Association « Mémoires des Esclavages » au travers des articles parus dans PrendreParti …

1 http://www.prendreparti.com/2020/06/13/max-relouzat-gardons-nous-de-dire-que-la-police-est-raciste/
2 http://www.prendreparti.com/2020/05/09/le-confinement-avive-les-memoires/
3 http://www.prendreparti.com/2019/11/19/brest-une-fete-de-la-fraternite-se-prepare-pour-le-10-mai-2020/
4 http://www.prendreparti.com/2019/05/10/vous-etes-la-pepiniere-de-leurope-vous-etes-lavenir-du-monde/
5 http://www.prendreparti.com/2019/05/01/la-ville-de-brest-adhere-a-la-fondation-de-la-memoire-de-lesclavage/
6 http://www.prendreparti.com/2018/12/13/rendre-a-cesaire/
7 http://www.prendreparti.com/2018/11/29/un-amer-de-la-liberte-sur-le-polder-du-moulin-blanc-de-brest/