Les machines à rêves de Theo Jansen …

Theo Jansen est un  sculpteur néerlandais du courant de l’art cinétique, qui se base sur l’art du mouvement  à travers des œuvres mobiles ou des illusions optiques. Ses œuvres sont  caractérisées par des sortes de myriapodes géants réalisés avec des tubes en plastique (PVC) et des bouteilles (vides), se mouvant grâce à la force du vent …

Il nomme ses créations des « Strandbeest » (bêtes de plage). Il en a réalisé une quarantaine en 25 ans … Une vidéo de 1′

Theo Jansen est la preuve vivante que les arts et les sciences peuvent cohabiter à la perfection. Cet artiste néerlandais, qui est également physicien, réalise depuis 1990 des sculptures absolument impressionnantes qui jouent avec le vent pour créer un effet d’animation.
Une vidéo de 4’33 » France Culture / TV5 Monde

Theo Jansen, sculpteur de vent

Les œuvres gigantesques de Theo Jansen sont des créatures inspirées du monde animal. Elles se déplacent à la seule force du vent.

Publiée par France Culture sur Mardi 25 août 2020

Ses sculptures cinétiques prennent ainsi la forme d’animaux imaginaires qui semblent prendre vie avec le vent. Doté d’une énorme imagination, cet artiste atypique donne vie à des créatures surprenantes qui s’apparentent pour la plupart à des mille-pattes entièrement composés de bois et de plastique recyclé.
Ces véritables “machines-engrenages” s’animent depuis plusieurs décennies sur les plages néerlandaises et elles ont fait un passage dans des musées comme au Palais de Tokyo à Paris en 2015. Le principe est le suivant : l’artiste a créé de véritables engrenages qui réagissent au vent pour permettre à ses sculptures de se mouvoir comme si elles étaient vivantes. Découvrez ci-dessous notre petite compilation des créations de cet artiste .

Pour en savoir plus sur les sculptures monstrueuses et fabuleuses de Theo Jansen, rendez-vous sur son portfolio.

Crédits : Theo Jansen
Crédits : Theo Jansen
Crédits : Theo Jansen
Crédits : Theo Jansen
Crédits : Theo Jansen
Crédits : Theo Jansen

Imaginé par : Theo Jansen / Source : strandbeest.com


Theo Jansen, l’automartiste

Le plasticien néerlandais crée, depuis vingt-cinq ans, de fascinantes « bêtes de plage » Un portrait publié dans Le Monde du 16 mai 2014

Il est en retard au rendez-vous qu’il a fixé et se confond en excuses. Sortant de son break Volvo, une 240 GL qui frôle la trentaine, il explique son souci : il s’envole pour les Etats-Unis dans quatre jours mais a dû abandonner son passeport à l’ambassade russe pour obtenir rapidement un visa. « Je n’aime pas ça… », lâche-t-il. Longs cheveux blancs au vent, manteau noir et jean élimé, Theo Jansen, 66 ans, est devenu un globe-trotteur et il se doit d’honorer tous ceux qui l’invitent pour montrer et parler de ses incroyables créatures, les Strandbeest (littéralement, « bêtes de plage »), que la France découvre enfin grâce à l’exposition que la Cité des sciences et de l’industrie consacre – jusqu’au 4 janvier 2015 – à une vingtaine d’œuvres dynamiques.

Ce jour-là, le Néerlandais clôture à La Haye, sa ville natale, une exposition de ses œuvres. Dans l’immense salle des turbines désormais désaffectée d’une centrale électrique trônent quelques spécimens de la quarantaine d’animaux articulés qu’il a créés en vingt-cinq ans.

Les Strandbeest offrent l’image d’animaux préhistoriques et peuvent se déplacer, poussés par la main de leur créateur ou par le vent. Il y a quelques jours, le dernier-né, Animaris Suspendisse, a fait ses premiers pas dans cet ancien hall où a été aménagée une plage de sable. La bestiole, dix mètres de long et quatre de haut, a un nez en forme de spoiler – un assemblage de bouteille en plastique – qui, collé au sol par le vent, devrait faciliter ses déplacements. Dans quelques semaines, elle ira respirer à l’air libre sur la plage de Scheveningen, où l’artiste organise des démonstrations dominicales qui attirent de plus en plus de monde. Il aimerait que son dernier enfant soit capable de résister à un vent de tempête.

C’est « par accident », affirme-t-il, qu’il a eu l’idée de ces créatures qui suscitent, chez tous ceux qui les ont vues, un sentiment d’émerveillement, mêlé d’un doute – mais comment arrive-t-on à bâtir une telle folie ? – et d’une pointe de crainte – la démarche lente des animaux réveille chez certains des peurs infantiles enfouies et l’idée d’une paranormalité.

Ces structures tubulaires, construites avec du matériel électrique en plastique que l’on ne trouve qu’aux Pays-Bas et en Belgique – « 0,10 euro le mètre dans tous les magasins de bricolage » –, sont désormais pourvues de leur propre existence aux yeux de Theo Jansen. Il n’en parle pas aisément au journaliste qui passe – question d’humilité sans doute -, mais, dans le gros livre où il explique sa démarche (The Great Pretender, 010 Publishers, 2 009), il évoque leur ADN, leurs muscles, leur cerveau (Cerebrum fut créé en 2006) et le fait qu’ils se nourrissent du vent. Marqué par ses origines catholiques, dernier des onze enfants d’une famille de fermiers ruinés par la guerre, il en est venu, écrit-il, à « entrer en empathie avec le Créateur ». Pas seulement « dans le rapport à la matière, mais dans le pur plaisir de créer ». Car, poursuit-il, « vous ne pouvez imaginer l’excitation qui me saisit lorsque quelque chose fonctionne, même le plus petit détail ».

Si la nature est largement constituée de protéine, dit-il, sa matière initiale à lui est donc ce tube de plastique blanc qu’il tord, sculpte, découpe en des milliers d’éléments dont une infime partie est encore exposée à La Haye. « Je veux créer mes propres formes de vie à partir de cette matière simple, flexible et extrêmement rigide à la fois. » Craignant qu’elle disparaisse un jour du marché, il en a donc récemment commandé… 50 kilomètres. De quoi, espère-t-il, assurer la fin de sa carrière.

Il a construit le vaste établi où il travaille et une gigantesque roue crantée qui semble être au cœur de son dispositif de création. Mais il n’en dira pas plus. Il parle peu d’ailleurs, habitué à une règle de solitude qu’il n’enfreint pas aisément. « J’ai essayé mais je ne supporte pas une autre présence quand je travaille, pas même celle d’une jolie stagiaire », sourit-il.

Autodidacte, Theo Jansen a développé des connaissances de pointe en aéronautique, en robotique, en mathématiques et en informatique. En 1980, il imagina une soucoupe volante, sonore et lumineuse, qu’il fit voler au-dessus de Delft. Il inventa ensuite un robot capable de peindre seul. Il se convainquit ensuite, à la faveur du développement de ses Strandbeest, qu’il pourrait créer une vie artificielle à base d’algorithmes mais, toujours, en gardant à l’esprit l’indispensable dimension poétique de ce projet.

« Si vous demandez à des ingénieurs ou des universitaires de concevoir un objet capable de marcher sur une plage, que vont-ils faire ? interroge-t-il. Un robot métallique armé de senseurs, de caméras et de cellules électriques. Ils ont des idées et les font vivre selon une méthode qui donne des résultats rapides et tangibles. » Lui, explique-t-il, aurait sans doute fait de même : « Nous avons tous des cerveaux exceptionnels mais ils se ressemblent sous bien des aspects. Mais les vraies idées arrivent par hasard, comme le montre la théorie de l’évolution. Je jouais avec des tubes en plastique depuis longtemps. Ce sont les animaux de plage eux-mêmes qui ont fait en sorte que je les construise. Et le tube en plastique m’a montré comment faire… » Theo Jansen est un merveilleux mystère et le reste pour ceux qui ont la chance de le rencontrer.

Jean-Pierre Stroobants, La Haye, envoyé spécial Quoidien Le Monde