Mai 1990 : pendant 6 jours , des pauvres vont vivre la vie des riches . Ilotopie installe un Palace cinq étoiles au cœur du quartier de la Castellane à Marseille.
24h/24 le personnel de l’hôtel – c’est à dire les acteurs d’Ilotopie – se met en quatre au service des habitants : petits déjeuner en chambre, piano-bar à toute heure, promenade en limousine, ménage, sur simple appel gratuit à la réception …
« Ilotopie, P.L.M palace à loyer modéré »,
une vidéo de 26′ signée John-Paul Lepers diffusée en 1990 par TF1
Ilotopie, Palace à loyer modéré à Marseille
Oeuvre(s) : Palace à Loyer Modéré (Bruno Schnebelin – Direction artistique)
Éclairage
L’histoire d’ilotopie commence à la fin des années 70, lorsque Bruno Schnebelin choisit de s’établir sur une île du Rhône, de la partager, chacun y construisant son habitat, et d’y concevoir des interventions artistiques à proposer aux élus des villes. L’Île aux Topies (1985), d’où seront issus les Gens de couleur (1989) qui parcourent les cités seulement revêtus de peinture éclatante, en est une métaphore. La compagnie est créée en 1980, Françoise Léger la rejoint en 1983. Elle réunit des plasticiens, des comédiens et des musiciens, et réalise des installations plus ou moins durables dont l’insolite questionne les habitudes et les modes de vie quotidiens. Parmi elles, on peut citer Les Oreilles géantes dans lesquelles laisser ou recevoir des messages, Le Grand Étendage public de kilomètres de linge, La Mousse en cage qui fige peu à peu les gestes des acteurs, La Vie en abribus, abandonnée lorsque, vu le nombre croissant des sans abri, elle ne pouvait plus être un jeu…
PLM, « Palace à Loyer Modéré », a eu lieu en septembre 1990 dans une cité populaire des quartiers nord de Marseille, La Castellane. Pendant une semaine, une HLM s’est transformée en hôtel de luxe, les comédiens en serviteurs hors classe, les habitants en clients rois. « PLM, écrit Françoise Léger dans l’ouvrage consacré à la compagnie, est sans doute notre proposition la plus étymologiquement utopique. Quelque chose qui ne peut pas exister mais va se réaliser quand même, un non lieu et en même temps un lieu de bonheur, un jeu de société grandeur nature où (…) la fiction se vit dans le réel et la réalité devient fiction. » Malgré les craintes des organisateurs, les habitants de la cité ont en général joué le jeu avec plaisir. Du côté des médiateurs sociaux, en revanche, l’expérience a été diversement appréciée et a parfois donné lieu à des malentendus moralisateurs. La visibilité qu’elle a donnée au quartier a indirectement accéléré la réhabilitation de l’immeuble.
Depuis un peu plus de dix ans, ilotopie crée aussi, hors des villes, des œuvres paysagères souvent liées à l’eau (Narcisse guette, 2001(voir ce document), Fous de bassin, 2004, Collectionneurs d’îles, 2007, Les Oxymores d’eau, 2009). La compagnie s’est construit à Port-Saint-Louis-du Rhône un lieu de fabrique et de résidence d’artistes, le Citron Jaune, et organise chaque année, sous la responsabilité de Françoise Léger, Les Envies Rhônements, un festival inscrit dans le territoire camarguais, entre art et environnement.
Voir aussi
– Le spectacle présenté en 1993 au Festival d’Avignon,Champ d’expérience 1er, sur Ina.fr.
– Le festival Envies Rhônements sur Ina.fr
Documentation
– Le site d’ilotopie
– Éric Heilmann, Françoise Léger, Jean-Louis Sagot-Duvauroux, Bruno Schnebelin, Ilotopie, les utopies à l’épreuve de l’art, Montpellier, L’Entretemps/ilotopie, 2008.