Zoom sur « RadioPlogo » au festival Longueur d’Ondes de Brest …

Du 1er au 5 février 2023 , c’était la 19 ème édition de Longueur d’Ondes, le festival de la radio et de l’écoute à Brest  En plus de faire partie du Jury , Antoine Chao y a présenté une petite rétrospective des radios écologistes de lutte en compagnie de Pauline Picot de Fréquence Paris Plurielle / Zoom écologie, L’occasion d’écouter  Marif Loussouarn évoquer la mythique « Radio Plogo(ff) » …


Écoutez le podcast de 16′ de « C’est bientôt Demain » diffusé par France Inter le dimanche 12 février 2023, c’est par ici …

De gauche à droite : Antoine Chao, Pauline Picot et Marif Lossouarn . Photo : Sébastien Durand

Pour en savoir plus sur la 19 ème édition du Festival Longueur d’Ondes de Brest, c’est par ici …


Une Radio Plogoff peut en cacher une autre …
Source : https://www.radiobrest.net/radio-plogoff.html

Plusieurs radios pirates portant le nom de Radio Plogoff se sont succédé depuis l’enquête d’utilité publique jusqu’à l’abandon définitif du projet de centrale nucléaire à la pointe du Raz.

  • Une première radio est montée depuis la mairie quelques jours autour du week-end du 6 février 1980. Une radio libre émet depuis la mairie. Radio Plogoff. Les animateurs locaux sont aidés par plusieurs jeunes militants parisiens qui ont déjà participé à de telles initiatives (Radio 93, Radio Riposte), écrit Gérard Borvon dans Plogoff un combat pour demain. Cette radio a émis un quart d’heure le samedi sur 102 mhz nous apprend Le Télégramme.
  • Par ailleurs, fin mai 80, pendant le week-end de la Pentecôte, 100.000 à 150.000 manifestants se sont retrouvés au cap Sizun pour un grand rassemblement antinucléaire. Une radio libre a émis pendant trois jours. Son histoire est celle d’une véritable opération commando.

Radio Plogoff Pentecôte 80

En 1980, la résistance des habitants de Plogoff contre le projet de centrale nucléaire à la pointe du Raz a été marquée par six semaines d’affrontements avec les forces de l’ordre lors de l’enquête d’utilité publique de février-mars. Fin mai, un grand rassemblement est prévu pendant les trois jours du week-end de la Pentecôte sur le thème de Plogoff-Larzac, même combat.
A Paris, les activistes de l’ALO, l’association pour la libération des ondes, aimeraient profiter de cet évènement pour monter une radio pirate. Mais les habitants de Plogoff se méfient de toute récupération de leur combat. Dans un premier temps les « Parisiens » se heurtent à une fin de non recevoir.

Les Parigots à Plogo
Ils reviennent cependant à la charge patronnés par des militants du Larzac. Et là, les portes s’ouvrent. Quand je suis arrivé à la mairie de Plogoff, le maire m’a simplement donné un numéro de téléphone », se souvient Francis Lattuga, un vétéran de la lutte contre le monopole d’Etat. Je suis allé dans une cabine téléphonique et là une personne m’a donné rendez-vous. » Il rencontre alors Yves, un vétérinaire qui lui demande ce dont il a besoin pour monter la radio. /Je lui ai dit qu’il faudrait tout d’abord un mat d’une dizaine de mètres. Il m’a répondu si 33 mètres me convenait !
Les voilà partis voir le mat en question. Il s’agissait d’un pylône appartenant au veto mais qu’il n’utilisait plus pour son boulot. Je lui également demandé deux batteries de 12 volts en cas de coupure de courant. Il m’a dit si je vous en procure douze de 24 V provenant de tracteurs, ça ira ? C’était le rêve !

La station émet sur deux fréquences

La petite équipe de radioactivistes s’installe dans le grenier d’une maison appartenant à la famille d’Annie Carval, la présidente du comité de défense. Nous ne sortions pas le jour, uniquement la nuit, témoigne Francis, aujourd’hui encore impressionné par l’organisation des habitants de Plogoff. Secrètement certains d’entre-eux installent la base du pylône en coulant du béton puis en dissimulant le tout par de la végétation. Le samedi matin, des milliers de sympathisants commencent à converger sur la commune de Plogoff. Toute opération de police devient impossible.

Le pylône monté en dix minutes
A 11 heures, nous avons reçu le feu vert. En dix minutes, le pylône a été dressé et haubané par une vingtaine de gars, avec ses deux antennes et le câble branché au studio du grenier. On a émis aussitôt. Tout a été prévu. La radio dispose de deux antennes et de deux émetteurs. Elle peut diffuser sur deux fréquences. Bien vu, car le brouillage commence. Les autorités n’avaient qu’un brouilleur. Nous disions donc aux auditeurs de changer de fréquence. Le brouillage a fini par s’arrêter.

Relayée en direct sur Paris

Un pylône bien haut, un endroit bien dégagé, une bonne puissance et une bande FM déserte, Radio Plogoff diffuse sur une bonne moitié de la Bretagne sur 100-101 mhz. En plus, via le téléphone, elle était relayée sur Paris par la station pirate Radio Image. Le premier soir, les animateurs épuisés, ferment l’antenne à 2 h. Mais à 7h du mat’, on a reçu un coup de fil pour nous dire de reprendre les émissions. Durant le week-end, de nombreux concerts et interventions ont lieu. Yves avait bricolé son émetteur de vétérinaire qu’on utilisait pour faire des directs. La radio émettra tout le week-end de Pentecôte jusque tard le lundi, vers 3 h du mat. Les autorités n’auront rien vu venir, ni rien pu faire.

A la mode des commandos
L’organisation avait tout d’un commando. On avait changé les plaques de voitures et on s’appelait par des noms de guerre. Il y avait Monsieur Charles, Maître du monde et Paco. Pendant un an, les flics ont cherché qui était ce Paco. C’était moi! Pour Paco-Francis, ce week-end aura été doublement inoubliable. Son fils est en effet né le samedi de ce fameux week-end de Pentecôte. Longtemps, mes copains l’ont surnommé Larzac-Plogoff.

Une radio active

En avril-mai et juin 1981, les CLIN de Brest ont monté une radio très puissante à Plogoff qui n’a jamais été inquiétée ni même brouillée.

Au beau milieu d’un morceau de musique soudain un animateur intervient : On nous signale qu’un fourgon de gendarmerie se dirige vers Plogoff. Nous allons devoir arrêter d’émettre. Une des voitures équipées d’une CB et qui surveillent les deux routes menant au village vient de donner l’alerte. On s’attend alors à ce que la radio, qui n’a jamais été inquiétée, cesse ses émissions pour mettre le matériel à l’abri. Mais non. Deux ou trois disques plus tard, l’animateur, plus calme, annonce que les gendarmes viennent d’avertir qu’ils ne sont pas là pour saisir la station mais pour un fait-divers, un cadavre retrouvé à la baie des Trépassés. Les autorités demandant quasiment l’autorisation d’entrer sur le territoire du cap, voilà résumé l’ambiance de « commune libre » qui règne alors sur ce promontoire rocheux, classé depuis site naturel et où à l’époque le gouvernement veut construire une centrale nucléaire.

Vers 17 heures on entendait la chanson qui ouvrait l’antenne, Keleier Plogo (les nouvelles de Plogoff), une complainte en breton du groupe Storlok. Voici l’ouverture d’antenne de la station qui annonce 92 FM mais la radio émettait sur 91.

Un gros émetteur italien

Un an auparavant, l’enquête d’utilité publique a été marquée par des affrontements quotidiens entre les forces de l’ordre, venues en nombre, et la population rejointe par des militants anti-nucléaires. Au printemps 1981, les opposants à la centrale espèrent la victoire de François Mitterrand à l’élection présidentielle car le candidat a promis d’annuler ce projet. Au début du mois d’avril, les militants du CLIN de Brest entendent les essais de Radio Brest Atlantique. L’idée germe très vite de monter une station à Plogoff. Contact est pris avec RBA pour s’équiper. Et voilà une équipe de militants partie vers l’Italie chercher le précieux matériel. Nous avons voyagé en Peugeot commerciale, se souvient Marif. Sage précaution car le CLIN a choisi du beau matériel: un émetteur à lampes de 600 W, une bête qui va permettre d’arroser tout l’ouest de la Bretagne sans problèmes.

Sur les ondes le 16 avril

A Plogoff, Annie Carval, la présidente du comité de soutien, met à disposition de la radio un garage situé sur sa propriété un peu à l’écart de sa maison. Le studio occupe le bas et en haut, le grenier accueille l’émetteur. Radio Plogoff est prête à démarrer sa première émission. La station démarre le 16 avril 1981 sur 91mhz. Elle n’arrêtera d’émettre qu’à la fin du mois de juin quand la décision de stopper le projet de centrale nucléaire est définitivement actée par le nouveau gouvernement. Le plus grand moment d’émotion à l’antenne, c’est le 10 mai à 20 heures lors de l’annonce de la victoire de François Mitterrand qui a inscrit au nombre de ses promesses l’enterrement du projet de centrale à Plogoff.

Radio Plogoff rime avec Radio Kerangoff

Après avoir gagné son combat contre la centrale nucléaire, la station a arrêté ses émissions et le matériel a été rapatrié sur Brest. L’émetteur a été utilisé un an plus tard pour monter Radio Kerangoff (ça rime avec Plogoff !)

Source : https://www.radiobrest.net/radio-plogoff.html


En savoir plus sur Marif Lossouarn
Égalité femmes-hommes. «Miser sur le collectif»

Un article signé Maxime Recoquillé paru dans Le Télégramme du 06 mars 2017

Les murs du bureau de Marif Loussouarn sont recouverts de documents et clins d'oeil à la lutte pour l'égalité femmes-hommes. Ici, devant son poster du film « Les Suffragettes », sur le combat du droit
Les murs du bureau de Marif Loussouarn sont recouverts de documents et clins d’oeil à la lutte pour l’égalité femmes-hommes. Ici, devant son poster du film « Les Suffragettes », sur le combat du droit de vote des Anglaises, au début du siècle dernier.

Le combat des femmes à Brest, elle le connaît sur le bout des doigts. Avant d’être adjointe à l’égalité femmes-hommes à Brest, Marif Loussouarn est une militante, une zeffe pur jus. À mi-mandat, alors que se déroulera, mercredi, la journée internationale des droits des femmes, elle rappelle les principes fondamentaux de sa lutte pour l’égalité des sexes. Revient sur l’origine de son militantisme, son parcours politique et le combat incessant qu’elle mène pour le droit à l’avortement, cycliquement remis en cause dans le débat public, et pour lequel, il convient de ne jamais baisser les armes.

À quand remontent vos premières manifestations  pour l’égalité femmes-hommes ?
La première remonte à 1973. C’était pour empêcher le prolongement du service national pour les garçons. J’avais 16 ans et j’étais lycéenne, à Brest. Il y avait Claude Morizur, du Fourneau, avec moi. Puis, ensuite, j’ai évidemment participé aux mouvements en faveur de la loi Veil. Je voyais des copines à moi quitter leur formation en raison de grossesses non-choisies. Ou d’autres qui connaissaient de gros soucis pour réaliser une IVG. Il faut bien se rappeler que les femmes qui étaient en couples, tous les mois, elles tremblaient. Il ne faut pas perdre de vue ce combat tant que ce n’est pas inscrit dans la Constitution. Il nous donne notre indépendance et notre droit de vivre autre chose. C’est un support technique très fort de notre émancipation.

En 1995, vous arrivez à la mairie de Brest. Comment passe-t-on de l’autre côté, du militantisme au politique ?
Je n’ai jamais imaginé devenir élue. J’étais déjà très engagée dans la lutte écologiste, depuis les années 70. Je privilégiais le circuit court, le bio.
À Plogoff, j’avais monté ma radio libre, juste avant la présidentielle de 1981. Le basculement intervient en 1995, avec l’arrivée de Pierre Maille à la mairie. Il ouvre la municipalité aux Verts, auxquels j’appartenais depuis 1992. À ce moment-là, je n’ai eu aucune hésitation pour accepter le poste. C’était à la santé. Je n’ai demandé la permission à personne.

Vous restez à la mairie jusqu’en 2008. Vous ne revenez que pour le deuxième mandat de François Cuillandre. Mais votre côté militant n’est jamais loin. Vous aviez, à votre retour, même indiqué vouloir faire du porte-à-porte…
Non, je ne fais pas de porte-à-porte. Mais je fais ce travail à travers mes permanences du mardi après-midi à L Cause. Quand on est élu, on ne s’éloigne pas dans sa tour d’ivoire. Je vais à la rencontre des gens pour comprendre ce qui se passe actuellement, pourquoi l’extrême-droite gagne du terrain, y compris chez les femmes. À Brest, comme partout. 
Le travail pour notre émancipation est un travail d’éducation populaire. Faire réfléchir des gens à leur condition. Pour ne pas se livrer pieds et poings liés, politiquement, à ces idées simplistes.

Le harcèlement de rue, pour les femmes, est-il un fléau brestois ?
Non, ça ne l’est pas plus qu’ailleurs. Même moins qu’ailleurs. Rien n’a été mesuré. Les marches exploratoires, par exemple, qui auront lieu le 9 et le 13 mars, vont nous aider à le sentir. Mais c’est un problème, oui. Récemment, j’ai reçu trois filles, âgées de 22 à 26 ans et qui avaient eu affaire à des harcèlements verbaux. Deux des trois portaient une bombe lacrymogène sur elles.

Nous arrivons maintenant à mi-mandat. Quel a été votre cheval de bataille durant ces trois premières années ?
La première moitié de mandat a été consacrée à la formation de beaucoup de collègues sur l’égalité professionnelle, les différences de salaire. Quelques centaines de salarié.e.s sensibilisés et en cours de formation. C’est un travail que l’on mène avec les ressources humaines et Nicole Quéré. En interne, le 13 décembre, nous avons aussi signé un guide pour la communication de la collectivité. Sans stéréotype de sexe. C’est une question d’image mentale, de formatage. Sinon, mon service est transversal. C’est à travers le sport, la culture, l’éducation, plus de justice, d’égalité dans les politiques déjà menées, que l’on va regarder à travers les lunettes de l’égalité. Par exemple, nous venons de lancer une action avec le Quartz, le Mac Orlan, la Maison du Théâtre, La Passerelle et La Carène, sur l’égalité femmes-hommes dans la culture et le milieu du spectacle. À quelle hauteur on soutient des créatrices ? Est-ce qu’on en soutient autant que des hommes ? Quels sont les publics qui viennent ? On éduque, on échange, on essaye de faire en sorte que notre argent public puisse profiter le plus égalitairement possible aux filles et garçons, aux femmes et aux hommes.

Vous sentez-vous seule dans ce combat ?
Je n’ai pas de service, pas de budget, mais j’ai une équipe d’alliés. Comme dans le sport, il faut miser sur le collectif. Grâce à mes deux mandats à la mairie, je connais bien les services. Je sais comment ça fonctionne. J’ai la chance d’avoir une thématique transversale. Puis je travaille aussi avec l’État et la déléguée départementale au droit des femmes, Marion Clément. Elle intervient beaucoup sur le secteur de Brest. Il y a aussi un garçon, Cédric Kerdraon, qui mène des actions de médiation visant à la tranquillité publique et qui est la cheville ouvrière des marches exploratoires à venir, le 13 mars. Toute seule, avec mes petits bras, je n’y arriverais pas.

Le site www.egalitefemmeshommes-brest.net recense tout le programme autour de la journée du 8 mars, ainsi que toutes les initiatives et rendez-vous des associations qui oeuvrent pour l’égalité femmes-hommes, au quotidien, à Brest.


Lire par ailleurs sur PrendreParti …

« Plogoff mon amour, mémoire d’une lutte »