Chili : « Voyage au bout de l’emprise de la Colonia Dignidad » …

La Colonia Dignidad, est une enclave allemande fondée dans le sud du Chili par l’ancien nazi Paul Schäfer . Sous l’apparence d’une société de bienfaisance, se pratiquaient torture, pédophilie et esclavage. Aujourd’hui, les langues se délient : des survivants de la colonie et des proches de détenus disparus à cet endroit se battent pour que justice soit faite. A voir notamment sur Netflix, « Voyage au bout de l’emprise »

« Il était clair pour moi que cet homme était une créature divine » : Paul Schäfer a réussi à mettre sous son joug toute une communauté. L’ancien caporal nazi et fondateur de la secte Colonia Dignidad au Chili pratiquait sur ses adeptes la torture et l’humiliation.  L’histoire résumée en 4′ par Arte …


Actuellement disponible sur Netflix …
Voyage au bout de l’emprise : Colonia Dignidad

https://www.netflix.com/fr/title/80196160

Saison 1 /Année de sortie : 2021
Regarder La mission. Épisode 1 de la saison 1.

Après la Seconde Guerre mondiale, le pasteur allemand Paul Schäfer crée un foyer pour jeunes. Accusé d’abus, il s’enfuit au Chili, où il fonde une nouvelle colonie.

Regarder La Terre promise. Épisode 2 de la saison 1.

Au Chili, des rumeurs se répandent sur Paul Schäfer, qui fonde un hôpital gratuit pour gagner les faveurs de la population. Mais Wolfgang Kneese s’enfuit et révèle tout.

Regarder Le spectre du communisme. Épisode 3 de la saison 1.

Salvador Allende arrive au pouvoir. En parallèle du trafic et de la fabrication d’armes, Paul Schäfer inflige un traitement toujours plus cruel aux jeunes de la colonie.

Regarder Un pacte avec le diable. Épisode 4 de la saison 1.

Paul Schäfer fournit des centres de torture à Pinochet contre des permis d’exploitation minière et d’autres avantages. Mais il peine à préserver la « pureté » des jeunes.

Regarder L'intouchable. Épisode 5 de la saison 1.

Les habitants de la colonie sont mobilisés pour soutenir les activités de Pinochet. Lorsque ce dernier perd le pouvoir, Paul Schäfer continue seul de son côté.

Regarder La chute. Épisode 6 de la saison 1.

Deux garçons s’enfuient et dénoncent Schäfer. Les colons, qui tentent de reconstruire leurs vies brisées, en paient le prix.


« Colonia Dignidad, une secte allemande au Chili »,

Nourrie de nombreux témoignages de victimes, cette fresque documentaire diffusée sur ARTE restitue l’enfer de Colonia Dignidad, une secte allemande fondée au Chili par un ancien nazi.
D’après un article signé par pour Arte /
28 juin 2021

« Colonia Dignidad, une secte allemande au Chili », mardi 29 juin sur ARTE (vidéo)

Partie 1 La terre promise

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, Paul Schäfer, un ancien caporal SS, regroupe des personnes en quête de paix, d’espérance et de fraternité. D’abord à Gartow, puis à Heide, il fonde en Allemagne une maison pour les jeunes.
En 1961, en pleine guerre froide, il installe sa petite communauté au Chili, à 350 kilomètres de Santiago. À l’écart de toute civilisation, la Colonia Dignidad – « Colonie de la dignité » –, aux airs de village allemand modèle, se compose d’ateliers, de champs, et même d’un hôpital où les Chiliens démunis sont accueillis. Si le projet peut paraître exemplaire, les intentions de Paul Schäfer le sont moins : l’homme est recherché en Allemagne pour viols sur mineurs.

Partie 2 L’ombre du passé

Les membres de Colonia Dignidad avaient décidé de consacrer leur vie à servir Dieu et à aider les déshérités. En réalité, le quotidien de ces trois cents Allemands est synonyme de travail forcé et de violences.

Autoproclamé guide spirituel, Paul Schäfer fait régner la terreur, et use de son pouvoir pour agresser sexuellement de jeunes garçons. Alors que les défections se multiplient, l’élection de Salvador Allende vient menacer l’existence de la secte. S’alliant avec les ennemis du président socialiste chilien, Schäfer agite la peur du communisme auprès de ses adeptes.

Partie 3 Les tréfonds du mal

Le coup d’État militaire de septembre 1973 suscite le soulagement au sein de la communauté. Paul Schäfer décide de collaborer avec le nouveau pouvoir. Manuel Contreras, le chef de la police secrète, ainsi qu’Augusto Pinochet en personne deviennent des habitués de Colonia Dignidad. Les opposants au régime y sont torturés et exécutés à l’abri des regards. Les membres de la secte ferment les yeux.

Partie 4 La vérité éclate

Contrairement aux victimes appartenant à la communauté, les adolescents chiliens vont, eux, dénoncer les agressions qu’ils subissent. Plus de trente ans après son arrivée au Chili, Schäfer fait l’objet d’une enquête pour abus sexuels. Après sa fuite en Argentine, certains membres de la Colonia Dignidad seront jugés pour complicité, tandis que d’autres peinent encore à mener une vie normale.

La mécanique de l’horreur

Cette incroyable histoire de la mal-nommée « Colonie de la Dignité » court sur plus de quatre décennies, pendant lesquelles son gourou Paul Schäfer a pu compter sur la complicité de la dictature chilienne.

C’est donc autant l’emprise psychologique d’un homme que son imbrication dans un système politique que retrace cette fresque documentaire nourrie de riches d’archives et de témoignages.

Donnant pour la première fois la parole à certains membres de cette infernale colonie, elle restitue parfaitement la mécanique de l’horreur et effectue un remarquable travail de mémoire, à rebours de la reconversion du centre… en site de tourisme rural.



 

«Colonia Dignidad», un ogre nazi au Chili

Disponible sur Arte.tv, cette série documentaire met en lumière, à grand renfort d’archives et de témoignages, les crimes de Paul Schäfer, gourou pédocriminel à la tête d’une secte dans les Andes.

Un article de  Johanna Luyssen publié dans Libération du 13 mars 2020

Selon les voyagistes en ligne, la Villa Baviera, à Parral au Chili, offre d’indéniables atouts touristiques : cet établissement aux allures de chalet alpin où l’on parle espagnol, anglais et allemand, avec piscine extérieure et restaurant, ne se trouve qu’à 9 kilomètres des sources chaudes de Quinamávida et Panimávida. Mais comment expliquer sur Trip Advisor que ce petit morceau de Bavière en pleine cordillère des Andes fut, de 1961 à 1997, le QG d’une secte, la Colonia Dignidad, dirigée par un ancien nazi, Paul Schäfer, coupable de viols sur 200 petits garçons ? Et aussi un lieu de détention et de torture d’opposants à la dictature de Pinochet, où la Dina, sinistre police politique dirigée par Manuel Contreras, se chargeait d’enterrer les suppliciés dans le jardin de cette jolie villa bavaroise, tandis que dans les salles communes, les enfants des adeptes de Schäfer jouaient l’Alceste de Gluck ? Ou encore que la colonie teutonne fut également un laboratoire secret de fabrication d’armes, notamment biologiques, du gaz sarin par exemple ?

Chair fraîche

Emprise psychologique, viols d’enfants, travail forcé, participation à la torture de victimes de la dictature chilienne, trafic d’armes… la liste des forfaits de Paul Schäfer est longue. Aussi longue que la liste de ses protecteurs, puisque l’ancien nazi pouvait compter sur le général Pinochet, sa police et son argent, mais pas seulement. «L’ambassade d’Allemagne, je la tiens dans ma main», disait Schäfer, et ce fut longtemps vrai. Les diplomates allemands à Santiago n’ont en effet pas hésité à renvoyer dans la gueule du loup plusieurs petits garçons violés par le gourou de la secte, pauvres fugitifs venus chercher aide et protection auprès de l’ambassade. Tout cela sous le regard indifférent du gouvernement à Bonn, qui considérait, comme l’a formulé le chancelier Helmut Kohl en 1991, que ce qui se passait à la Colonia Dignidad était exclusivement le problème du Chili.

La désinvolture des autorités allemandes et chiliennes permettra notamment à Schäfer de violer des enfants pendant quarante ans. Après qu’il a graduellement interdit aux adeptes de la Colonia Dignidad de se reproduire, séparant hommes et femmes, enfants et parents, le taux de natalité de la secte a fini par chuter dans les années 90. En manque de chair fraîche, Schäfer le Minotaure a donc transformé la Colonia Dignidad en centre aéré pour enfants chiliens. Ce sont ces derniers qu’il se mettra alors à violer, jusqu’à ce que l’un d’entre eux, Cristobal Parada, s’isole dans les toilettes de la colonie, seule pièce sans caméra de surveillance, pour écrire «Aidez-moi, sortez-moi de là, l’homme me le met à l’intérieur» sur un bout de papier qu’il glissera discrètement à un camarade venu passer le week-end, lequel le transmettra à sa mère.

La plainte qui suit mène tout de même, lentement mais sûrement, à l’interpellation de Schäfer, qui parvient malgré tout à s’évaporer en 1997, direction l’Argentine où il vit jusqu’à son arrestation en 2005 – il mourra cinq ans plus tard en prison. Il avait fondé la Colonia Dignidad en 1961, mais ce n’est pas la date du début de ses méfaits, puisque dans les années 50, en Allemagne, il avait recueilli des orphelins de guerre dans son foyer pour enfants, où il a commis un nombre inquantifiable de viols.

Bunker

Cette monstrueuse histoire a été relativement peu racontée à la télévision ou au cinéma, si l’on excepte le thriller Colonia de Florian Gallenberger, sorti en 2015, et de toute manière largement romancé. Disponible sur Arte.tv, la série documentaire Colonia Dignidad, une secte allemande au Chili (quatre épisodes) n’en est que plus indispensable, d’autant qu’elle pointe parfaitement les zones d’ombre restantes de ce dossier, notamment politiques – l’attitude des autorités allemandes, entre autres. Tout cela est d’autant plus analysable qu’il existe une grande quantité d’archives vidéo sur le sujet, reportages télévisés, clips de propagande pour les «œuvres sociales» de la Colonia Dignidad, enregistrements de Schäfer et même des images amateur prises par les adeptes de la secte lors de l’interpellation de leur gourou afin d’intimider la police. Mais la série a surtout le mérite d’avoir collecté un nombre impressionnant de témoignages de première importance : des anciens adeptes de la secte aux suppliciés de Pinochet, des victimes allemandes de viols à l’enquêteur chilien qui s’était donné comme objectif d’interpeller Schäfer, en passant par des proches du gourou pédocriminel. Ils racontent tout, avec des mots simples et beaucoup de détails.

Prenons Karl van den Berg, par exemple. Cet ancien dirigeant de la colonie, l’un des bras droits de Schäfer, explique candidement avoir participé à la torture d’un opposant au régime de Pinochet, détenu dans un bunker : «Paul Schäfer m’avait demandé d’apporter à manger et à boire à un homme, d’évacuer ses besoins. Je lui ai aussi donné de l’eau pour se laver. Et puis l’homme a disparu, du jour au lendemain. J’ignore comment il est arrivé, j’ignore aussi comment il est reparti.» Avant de lâcher cette phrase glaçante, car entendue mille fois lors des procès d’anciens nazis, d’Adolf Eichmann à Oskar Gröning : «Schäfer m’avait donné l’ordre de faire ce travail. J’ai rempli ma mission. Je n’en sais pas plus sur le bazar en bas.»


Colonia Dignidad, el secreto de abusos y torturas de la historia chilena