Denez Prigent dévoile « Stur an Avel, Le Gouvernail du Vent »

Denez Prigent dévoile cette semaine son onzième album « Stur an Avel » (« Le Gouvernail du Vent »). C’est beau à en pleurer. « Dans le vent contraire, nous germerons. Nous grandirons, nous apprendrons. Dans le vent contraire, nous verdirons, nous bourgeonnerons, nous fleurirons. ». C’est beau à en valser une nuit entière du côté de Camfrout , sous les branches d’un vieux chêne aux racines kerhorres, là où tout a commencé …

Le Clip officiel de Waltz of Life réunit Denez, Oxmo Puccino & Aziliz Manrow …

Un clip tourné dans le colombier du château de Rosanbo à Lanvellec. C’est magnifique, tout en cercle, avec des niches en quinconce. Tout en haut, il y a un trou comme un œil. On a l’impression d’être à l’intérieur d’un œil. Et c’est rond, ça tourne comme une valse …

« De huit à sept heures du mat’
Fier d’être un gentleman Degemer mat
Je m’inspire de la gente dame
On se tient par la taille
On s’enlace par les épaules
Ça n’a jamais vibré
Comme ça depuis l’école
La tête sur les violons
Les poings marquent la basse
Quand le pied gauche avance Le pied droit le remplace
On reprendra si les minos dorment
Tu joueras à la flûte de pan
Pour moi le minotaure
Nous parlerons du beau temps
Sous un parapluie
Tu resteras pour les frissons
Et les poissons frits Les murs sont bâtis des questions
Qu’on se pose Puis la vérité change La métamorphose
Je vous pose une vaste colle
Cette vie est une valse folle
Tournoyer jusqu’à l’ivresse »

Un entretien vidéo de 7′ dans « Supplément d’Art » de FR3 consacré à la sortie de son 11e album …


Le 11è album de Denez Prigent nous invite à ne pas capituler face aux vents contraires …

Dans ce 11è album, Stur an avel, Denez Prigent continue sa quête de sonorités nouvelles. Une valse, un tango, des gwerz bien sûr. La participation du rappeur, Oxmo Puccino, de la chanteuse de country, Aziliz Manrow. Ou encore ‘En avel a benn’, invitant à lutter face aux vents contraires.

Denez Prigent : "Les musiciens tissent des habits autour d’un corps, qu'est ma voix. Et puis j'orchestre. Je ne sais ni lire ni écrire la musique donc je fais tout d’instinct."
Denez Prigent : « Les musiciens tissent des habits autour d’un corps, qu’est ma voix. Et puis j’orchestre. Je ne sais ni lire ni écrire la musique donc je fais tout d’instinct. »© Emmanuel Pain

Stur an avel (le gouvernail du vent), le onzième album de Denez Prigent, sort ce vendredi 16 avril. Plein de belles trouvailles sonores, mélangeant divers univers musicaux comme l’artiste aime tant le faire.

L’album a été remarqué pour son titre « Waltz of life », co-interprétré avec la chanteuse de country Aziliz Manrow et le rappeur Oxmo Puccino.
Mais d’autres morceaux sont à saluer : le tango c’hwernoni (amertume) ou ‘En avel a-benn’ (dans le vent contraire), un texte magnifique en hommage aux peuples opprimés, accompagné du bagad « La Kevrenn Alre ».

  • Denez Prigent, vous sortez votre 11è album, en quoi est-il différent des précédents ?

Chaque album, c’est une moisson différente qui arrive tous les deux ou trois ans. Entre temps, plein d’événements arrivent. Et j’écoute de la musique, je découvre de nouveaux musiciens. Ça a été le cas pour le trompettiste Youn Kamm, par exemple. J’ai aussi remarqué le Lorientais Jean-Baptiste Henry, qui joue du bandonéon. Je leur ai alors proposé de s’adapter à ma mélodie bretonne.

  • C’est important pour vous de chercher toujours de nouveaux sons ?

J’aime introduire de nouveaux instruments. Avant, le chant breton se pratiquait a capella, puis on a introduit des instruments : d’abord la harpe, puis l’accordéon, le violon… Yann Tiersen joue sur deux morceaux : du piano, du violon, de l’accordéon et des ondes Martenot. A chaque fois, les instruments apportent des couleurs supplémentaires. Et ces instruments deviennent petit à petit, eux aussi, bretons.

  • Comment se passe votre travail d’écriture ?

J’écris tout le temps. J’ai deux fichiers dans mon ordinateur : d’un côté, des textes, de l’autre des mélodies. Et parfois, quand j’en ressens l’envie, je relis mes textes. S’il y en a un qui me plaît, j’essaie de lui faire correspondre une mélodie. J’ai suffisamment de matière en réserve pour trois ou quatre albums, mais il faut laisser du temps entre deux albums pour ne pas se répéter.

  • Comment se passent vos collaborations avec les autres musiciens ?

Le chant est l’axe central de mon travail. Je viens de la gwerz. Donc j’enregistre ma voix a capella et j’envoie le fichier aux musiciens pour qu’ils l’habillent. Ils tissent des habits autour d’un corps, qu’est ma voix. Je ne sais ni lire ni écrire la musique donc je fais tout d’instinct. Et parfois une idée en amène une autre. J’entends l’ajout de trompette et je me dis que du bandonéon irait bien avec…

  • Comment vous est venue cette valse, Waltz of life, que vous interprétez avec Aziliz Manrow et Oxmo Puccino ?

La valse n’est pas du tout mon style de prédilection. En regardant une scène de bal dans le film « Orgueils et préjugés », un air de valse m’est venu. C’était un pari pour moi d’interpréter une valse. Alors, j’ai poussé le pari jusqu’au bout en invitant deux autres chanteurs, très éloignés de la valse aussi, à m’accompagner sur le morceau. Aziliz Manrow est une chanteuse anglaise de country qui vit en Bretagne. Et Oxmo Puccino est le rappeur bien connu.

  • Le clip de cette valse a été tourné tout près de chez vous à Lanvellec, vous pouvez nous en dire plus ?

Oui, il été tourné dans le colombier du château de Rosanbo à Lanvellec. C’est un des plus grands colombiers de Bretagne et il est parfaitement conservé. On l’avait découvert avec mon épouse Stéphanie en nous promenant. C’est magnifique, tout en cercle, avec des niches en quinconce. Tout en haut, il y a un trou comme un œil. On a l’impression d’être à l’intérieur d’un œil. Et c’est rond, ça tourne comme une valse.

  • Vous tournez le clip à deux pas de chez vous, vous enregistrez à Plestin les Grèves, à quelques kilomètres. C’est important cet ancrage dans cette partie du Trégor ?

Dans un rayon de 15 kilomètres autour de chez moi, j’ai un vivier de musiciens avec lesquels je travaille. A Plestin, il y a le studio d’enregistrement de Nicolas Rouvière. C’est un excellent ingénieur du son et un excellent sonorisateur car il a une oreille exceptionnelle. C’est rare d’avoir ces deux casquettes. Nicolas sonorise mes concerts depuis des années et j’enregistre mes albums dans son studio. J’en ai déjà enregistré cinq chez lui.

  • Dans votre morceau « En avel a benn » (dans le vent contraire), vous écrivez : « Dans le vent contraire, nous germerons. Nous grandirons, nous apprendrons. Dans le vent contraire, nous verdirons, nous bourgeonnerons, nous fleurirons. » A quoi faites-vous allusion ?

Je parle des peuples opprimés. Entre autres le peuple breton. La langue est une vision du monde. Si on l’interdit, le peuple disparaît. A un moment, on a interdit à des générations de Bretons de parler leur langue maternelle. C’était puni et honteux. Malgré tout, il faut continuer, se relever dans le vent contraire. A force, on finira par changer le sens du vent.


Denez Prigent, la langue bretonne à l’honneur

Le représentant de la chanson bretonne Denez Prigent, était notre invité culture à l’occasion de la sortie de son 11ème album: Stur an Avel.


Denez Prigent : « Parler de ‘langue régionale’ est un anachronisme »

Le breton dans le cœur

Propos recueillis par Mathilde Karsenti et

Publié parMarianne le

Marianne : Votre onzième album, « Stur an Avel », appelle la vie et rappelle la mort. Ces thèmes vous habitent-ils autant qu’ils hantent la Bretagne ? Actualité inactuelle s’il en est…

Denez Prigent : Le thème de la mort est très présent en Bretagne. Il y a peu de séparations entre les vivants et les morts. On retrouve fréquemment ce thème dans la « gwerz », un style de chant très ancien, datant du Ve siècle déjà. La gwerz est un chant de tradition orale transmis de génération en génération qui relate des événements tragiques comme des naufrages, des batailles, des massacres ou encore des épidémies par exemple. Il existe notamment une gwerz célèbre sur la peste qui a fait de nombreuses victimes au VIIe siècle dans le pays du Faouet. Ceux qui composent ces chants sont généralement contemporains de l’événement. En Bretagne, la mort, « l’Ankou » a été personnifiée, c’est un spectre au visage décharné, ombragé par un grand chapeau, portant une faux montée à l’envers. On peut voir des représentations de cette figure druidique (à l’origine) dans la plupart des églises et des chapelles bretonnes.

Les « Grasoù », sorte d’oraisons funèbres, font aussi partie de cette tradition. Les femmes se réunissaient autour du corps du mort pendant trois jours et de façon ininterrompue, elles récitaient ces incantations mi-païennes mi-chrétiennes. J’ai d’ailleurs écrit un texte dans ce style dans mon nouvel album, inspiré par un crâne qui se trouvait dans un ossuaire. Tous les cinq ans, on « libérait » le cimetière, et on plaçait les os des défunts dans cette chapelle funéraire. On déposait les crânes dans des boîtes avec le nom du mort. La famille pouvait ainsi voir la tête de leurs ancêtres et se recueillir devant elles : la mort n’est pas tabou en Bretagne … Suite de l’article  réservée aux abonné.es


« Le gouvernail du vent », le dernier album de Denez Prigent

Émission présentée le 31 mars 2021 par Vincent Belotti
Durée émission : 57 min / Cette émission est archivée. Pour l’écouter, inscrivez-vous gratuitement ou connectez-vous directement si possédez déjà un compte RCF.

"Le gouvernail du vent", le dernier album de Denez Prigent
© Emmanuel Pain

Un chêne bien enraciné qui ouvre ses feuilles à tous les vents. C’est ainsi que se définit Denez Prigent, chanteur en langue bretonne qui a su renouveler le genre en mélant sonorités électro et métissées. Rencontre à l’occasion de la sortie de son dernier album « Stur an avel »

 Bienvenue dans Stur an Avel – Le Gouvernail du Vent, un album ouvert sur le monde, résolument actuel, créateur d’images et de rêves : Ce nouvel album est entièrement constitué de chants de ma composition que j’ai d’abord enregistrés a cappella au studio Le Chausson près de chez moi. Puis, chaque titre a été adressé au beatmaker James Digger pour qu’il leur trouve une trame électro sur laquelle les musiciens sont venus se poser. Aucun arrangement n’a été écrit au préalable; le studio devenant ainsi un lieu de création. La fusion entre instruments acoustiques et sonorités électro est le fil rouge, le liant entre chacun des titres qui donne à l’ensemble une couleur unique. Denez Prigent

– Sensible, la marche vannetaise Ar garantez – L’amour, quand le chant de mariage se pose sur le flux et le reflux des nappes et des pulsations électro.
– Singulier, le duo synthétique organique des vibrations des ondes Martenot jouées par Yann Tiersen et des voix de Denez et Emilie Quinquis sur Gant ar red – À la dérive crée une atmosphère fantomatique.
– Tragique, le chant solennel nous dit l’histoire tourmentée de Gwerz Montsegur – La Gwerz de Montségur et de sa marche funèbre
– Envoutant, le chant nous conte l’univers enchanteur et la magie des sortilèges de la gwerz An arc’hig balan – Le petit coffre d’ajonc, nous plonge dans celui de la fantastique et effroyable Ar rouanez Ganibal – La reine cannibale.
– Hypnotique, la folle tournerie festive et libératrice de Ar grampouezenn-nij, quand la transe électro et ses boucles répétitives se mêlent aux rythmes ancestraux du Kan-Ha-Diskan
– Stimulant, le mix voix – ambiance jungle du chant à danser An hentoù-tro invite à une gavotte.
– Intimiste, Kantreadenn – Errance, chant poétique sur le déracinement et la perte, entre en résonance avec les modulations sombres du piano et le pleur de la cornemuse écossaise.
– Lestr Dienez – Navire Détresse, extrait du recueil Kañv – Deuil, évoque avec délicatesse une mort libératrice et vient clore ce 11ème album.
Je compose habituellement mes mélodies sur le mode mineur. Cela leur donne donc un côté un peu triste ou mélancolique. Mais il ne s’agit pas d’une tristesse angoissante qui entraîne vers le bas mais plutôt d’une tristesse purificatrice, régénératrice comme peut l’être le pleur. Comme beaucoup de Bretons, je partage une mélancolie positive. La Bretagne est le pays où l’on trouve le plus grand nombre de chants dramatiques, hantés par la mort, mais aussi celui où l’on danse le plus. Denez Prigent