Des clubs norvégiens prônent un boycott de la Coupe du Monde 2022 au Qatar …

C’est l’une des faces peu reluisantes de la Coupe du monde de football qui doit se dérouler au Qatar en 2022. Selon le quotidien britannique The Guardian, depuis décembre 2010, au moins 6 500 travailleurs migrants venus d’Inde, du Pakistan, du Népal, du Bangladesh ou encore du Sri Lanka, sont décédés au Qatar. En Norvège, les premières voix s’élèvent pour demander le boycott de la Coupe du Monde 2022 au Qatar …

L’enquête de « The Guardian » résumée dans une vidéo de 2’40 » éditée par Afriquesport.net …

Football. Coupe du Monde 2022 : 6 500 ouvriers seraient morts dans les chantiers au Qatar

Un article de Tom Bertin publié dans l’Ouest France du

Depuis l’attribution de la Coupe du Monde 2022 au Qatar en 2010, plus de 6 500 travailleurs migrants seraient morts sur les chantiers. La faute à une chaleur trop intense, des chutes et des insuffisances cardiaques, et autres. Ce nombre de décès fait contraste avec le chiffre officiel donné par le Qatar, bien moins élevé.

Le Lussaïl Iconic Stadium et ses 80 000 places (ici, en 2015) accueillera le match d’ouverture et la finale de la Coupe du monde 2022.
Le Lussaïl Iconic Stadium et ses 80 000 places (ici, en 2015) accueillera le match d’ouverture et la finale de la Coupe du monde 2022. | DR

6 500. C’est le nombre de travailleurs migrants qui seraient morts dans les chantiers de construction des stades au Qatar depuis 2010, soit l’année de l’attribution de la Coupe du Monde 2022 au pays du Golfe. Ces chiffres, révélés ce mardi 23 février par The Guardian, ont été récoltés auprès des gouvernements du Sri Lanka, du Pakistan, d’Inde, du Bangladesh et du Népal. En moyenne, depuis 2010, douze ouvriers auraient perdu la vie chaque semaine.

Les causes principales des décès sont les fortes chaleurs, les chutes et les insuffisances cardiaques. Ces chiffres effrayants le sont d’autant plus par leur non-exhaustivité. Ils n’incluent pas les chiffres de plusieurs pays qui envoient un grand nombre de travailleurs au Qatar, comme les Philippines et le Kenya. Les décès survenus depuis les derniers mois de 2020 ne sont également pas comptabilisés.

«  Une proportion très importante des travailleurs migrants décédés depuis 2011 n’était dans le pays que parce que le Qatar a gagné le droit d’accueillir la Coupe du monde », affirme Nick McGeehan, l’un des dirigeants de FairSquare Projects, organisme juridique spécialisé dans les droits du travail dans le Golfe. Pourtant, selon les données fournies par le Qatar, seuls 37 décès de migrants sont liés aux chantiers de construction des sept nouveaux stades construits à l’occasion de la compétition. Et parmi eux, seuls trois travailleurs immigrés sont morts à cause d’un accident de travail.

« Un manque de transparence » du Qatar

Il y a donc un grand écart, voire un gouffre, entre les chiffres officiels et le nombre réel de décès de travailleurs immigrés. Au vu des très grandes ambitions qataries, ces décès ternissent un peu plus l’image du pays. Alors, certains accusent le Qatar de minimiser son bilan. C’est le cas de May Romanos, chercheuse du Golfe pour Amnesty International. « Il y a un réel manque de clarté et de transparence autour de ces décès ».

Le Qatar, de son côté, dément formellement ces accusations. « Le taux de mortalité dans ces communautés se situe dans la fourchette prévue en fonction de la taille et des caractéristiques démographiques de la population. Cependant, chaque vie perdue est une tragédie et aucun effort n’est épargné pour essayer d’éviter chaque mort dans notre pays », se défend un porte-parole du gouvernement.

Un scandale suffisamment gros pour remettre en question l’attribution de la plus grande des compétitions internationales ? Pas pour la Fifa, qui maintient sa confiance envers le pays du Golfe. « Avec les mesures de santé et de sécurité très strictes sur le site, la fréquence des accidents sur les chantiers de la Coupe du monde de la Fifa a été faible par rapport à d’autres grands projets de construction dans le monde », déclare un porte-parole de l’institution. Pour rappel, la compétition se déroulera du 21 novembre au 18 décembre 2022.

Tom Bertin


Le prix du foot : 6500 travailleurs migrants morts sur les chantiers liés au Mondial 2022 au Qatar

par Thalia Creac’h

Au Qatar, les chantiers liés à la future Coupe du monde tuent, beaucoup. Les alertes d’ONG sur les conditions de travail des ouvriers migrants s’enchaînent pourtant depuis de nombreuses années, mais se heurtent au déni du gouvernement qatari et de la FIFA.

C’est une enquête du Guardian qui a révélé le décompte morbide : le nombre de travailleurs migrants décédés au Qatar, notamment sur les chantiers en vue de la future Coupe du monde de football de 2022 (sept stades, un aéroport, des infrastructures de transports, des hôtels…). Au moins 6500 travailleurs migrants auraient péri. Ils étaient notamment originaires d’Inde, du Pakistan, du Népal, du Bangladesh et du Sri Lanka. Selon le journal britannique, depuis décembre 2010, date à laquelle la compétition a été attribuée au Qatar, chaque semaine, en moyenne 12 travailleurs migrants sont décédés.

Ce décompte a été réalisé grâce aux données du Sri Lanka, du Népal, de l’Inde et du Bangladesh obtenues par le Guardian, auxquelles s’ajoutent les chiffres de l’ambassade du Pakistan au Qatar. La pandémie de covid-19 n’est, selon le journal, pas responsable de la plupart de ces morts.

Infographie représentant la nationalité des personnes décédées, réalisée par l’institut de statistique Statista

Des « morts naturelles » suspectes

Ces chiffres sont probablement sous-estimés. Les décès des derniers mois de l’année 2020 ne sont pas pris en compte. En outre, les chiffres concernant les décès des travailleurs kenyans et philippins, très nombreux à se rendre au Qatar, ne sont pas encore accessibles. L’accès à des données transparentes et rigoureuses a été particulièrement complexe pour les journalistes.

Le lien entre ces morts et les chantiers de la Coupe du monde est indirect, puisque les registres de décès ne répertorient pas les lieux de travail. Officiellement, seuls 37 décès sont directement attribués à la construction des stades. Cependant, Nick McGeehan, directeur de FairSquare Projects – organisation destinée à la protection des travailleurs du Golfe –, a assuré qu’ «  une proportion très importante des travailleurs migrants qui sont morts depuis 2011 n’étaient dans le pays que parce que le Qatar a gagné le droit d’accueillir la Coupe du monde  ». Parmi ces 37 décès, les organisateurs de l’événement en ont attribué 34 à des raisons « non liées au travail  ». Cette classification a été remise en question par des experts. Pour cause, dans certaines situations, elle a été employée pour qualifier des décès survenus sur les lieux de travail, en particulier sur les chantiers des stades.

D’après le Guardian, la plupart des décès sont officiellement attribuées à des morts « naturelles », comme des insuffisances cardiaques ou respiratoires. Les taux de « décès naturels » s’élèveraient à 69 % pour les Indiens, les Népalais et les Bangladais. Or, le plus souvent, aucune autopsie n’a été réalisée et aucune « explication médicale légitime » n’a été avancée. Les révélations du journal sont corroborées par des recherches menées par l’Organisation internationale du travail des Nations unies, précisant que la très forte chaleur au Qatar, notamment en été, peut être en partie responsable de ces décès sur les chantiers.

Depuis dix ans, les alertes se sont multipliées sur les conditions de travail des chantiers de la Coupe du monde. En vain. En 2014, des juristes ont publié un rapport conseillant de mener des autopsies « dans tous les cas de mort inattendue ou soudaine ». Ces recommandations n’ont pas été suivies par le gouvernement qatari. L’organisation non-gouvernementale internationale Human Rights Watch a également demandé au Qatar d’enquêter de manière plus approfondie sur ces morts et de délivrer des certificats de décès plus transparents. Sans résultat au vu du manque d’informations sur les causes des décès.

En France, Sherpa – association de lutte contre les crimes économiques – a déposé plainte en novembre 2018 contre le groupe de BTP Vinci et ses filiales au Qatar pour « réduction en servitude, traite des êtres humains, travail assorti d’une rémunération sans rapport avec l’importance du travail, travail incompatible avec la dignité humaine, travail forcé ». L’instruction est encore en cours.

Le déni du gouvernement qatari

Le gouvernement qatari s’est défendu en indiquant que le nombre de morts était proportionnel au nombre de travailleurs migrants et que, parmi eux, se trouvaient aussi des col-blancs morts naturellement et vivants au Qatar depuis longtemps. « Le taux de mortalité au sein de ces communautés se situe dans la fourchette prévue pour la taille et la démographie de la population. Cependant, chaque perte de vie est une tragédie, et aucun effort n’est épargné pour tenter d’empêcher chaque décès dans notre pays », a déclaré un porte-parole du gouvernement. Il a également indiqué que les travailleurs migrants bénéficiaient de soins de qualité et en perpétuelle amélioration.

« Nous regrettons profondément toutes ces tragédies et nous avons enquêté sur chaque incident afin de tirer les leçons qui s’imposent. Nous avons toujours maintenu la transparence sur cette question et nous contestons les affirmations inexactes concernant le nombre de travailleurs qui sont morts sur nos projets », a de son côté répondu le comité organisateur de la Coupe du monde. Un porte-parole de la FIFA, a affirmé qu’« avec les mesures très strictes de santé et de sécurité sur les sites […] la fréquence des accidents sur les chantiers de la Coupe du monde de la Fifa a été faible par rapport à d’autres grands projets de construction dans le monde ». Le Guardian précise que la Fifa n’a pas apporté de preuves à ces affirmations.

La mort de ces travailleurs a des conséquences dramatiques pour les familles. Elles se retrouvent démunies financièrement et dans l’incompréhension face à la perte d’un de leur proche. Les exemples cités par le Guardian mettent en lumière des compensations minimes. Madhu Bollapally, employé indien de 43 ans qui avait une femme et un fils, travaillait ainsi au Qatar depuis 6 ans. Sa mort a été attribuée à une insuffisance cardiaque. Sa famille a reçu 114 000 roupies (1280 euros) en compensation et en salaire impayé.

Thalia Creac’h


Coupe du Monde 2022. En Norvège, des clubs demandent le boycott et dénoncent « l’esclavage moderne »

L’enquête de The Guardian faisant état de 6 500 travailleurs immigrés morts depuis 2010 au Qatar a marqué les esprits en Norvège. Tromso, club de première division, a demandé ce 26 février à la fédération norvégienne de boycotter la compétition. Plusieurs autres clubs ont déjà rejoint le mouvement.

En Norvège, des voix s’élèvent pour demander le boycott de la Coupe du Monde 2022 au Qatar.
En Norvège, des voix s’élèvent pour demander le boycott de la Coupe du Monde 2022 au Qatar. | AFP

 La critique et le dialogue n’ont pas abouti. Nous pensons qu’il est temps de passer à l’étape suivante : le boycott ​. La requête du Tromsø IL, club de première division norvégienne, est plus qu’inattendue. Ce 26 février, le club a demandé à la Fédération norvégienne de football de boycotter la Coupe du Monde 2022. Cela fait suite à l’enquête de The Guardian parue ce mardi 23 février, qui révèle que 6 500 travailleurs immigrés seraient morts au Qatar depuis l’attribution de la Coupe du Monde 2022 au pays du Golfe en 2010.

6 500 travailleurs immigrés seraient morts dans les chantiers depuis 2010

Cette nouvelle a révolté le club norvégien, et il le fait savoir à travers un communiqué.  Le fait que la corruption, l’esclavage moderne et un nombre élevé de travailleurs morts soient à la base de la chose la plus importante que nous ayons, la Coupe du Monde, n’est pas du tout acceptable. Nous ne pouvons plus nous asseoir et regarder des gens mourir au nom du football ​.

Ces quelques lignes ne laissent pas indifférent en Norvège. Viking FK et Strømsgodset, deux autres clubs d’Eliteserien, ont soutenu cette initiative et se sont engagés aux côtés du Tromsø IL. Trois autres (Rosenborg, Odd et Stabæk) auraient déjà annoncé que la question serait à l’ordre du jour des prochaines réunions, d’après Johann Crochet, journaliste à RMC Sport. Ce mouvement pourrait donc prendre de l’importance, au sein du pays et au-delà.

 Nous pensons que si la Norvège se qualifie grâce à la qualification à venir, nous devrions refuser de nous rendre au Qatar ​, affirme le club. Une annonce qui devrait faire réfléchir du côté de la Fédération. Serait-il possible d’imaginer les coéquipiers d’Erling Haaland et Martin Ødegaard refuser de jouer une compétition si prestigieuse ?


Coupe du monde de football 2022 au Qatar : Quand le football est bien une affaire de vie ou de mort

Un article de Philippe Auclair publié dans Eurosport.fr du 02/03/2021

6750 : C’est le nombre minimum de travailleurs immigrés morts au Qatar dans le cadre de la préparation de l’organisation du Mondial de football 2022, selon une enquête de The Guardian. Une information qui a conduit des supporters scandinaves à préconiser un boycott de la compétition. Philippe Auclair évoque leur choix dans sa chronique : « Ils ont fait le leur. Ayons le courage de faire le nôtre. »

Une réplique de la Coupe du monde devant le chantier du Khalifa International Stadium, le 31 janvier 2016 à Doha, capitale du Qatar.

Une réplique de la Coupe du monde devant le chantier du Khalifa International Stadium, le 31 janvier 2016 à Doha, capitale du Qatar.

 

On meurt sur les chantiers des stades qu’une Coupe du monde atteinte de gigantisme exige qu’on bâtisse ou qu’on rénove. Mourir pour qu’on puisse frapper dans une balle devrait nous être insoutenable, mais la plupart du temps, presque toujours en fait, on détourne le regard, on se bouche les oreilles et on demeure muet. On dénombra deux décès sur les sites de construction sud-africains pour le Mondial de 2010, huit sur ceux du Brésil pour l’édition de 2014, vingt-et-un en Russie avant le tournoi de 2018. On en est aujourd’hui à trente-sept à l’approche de Qatar 2022.
Mais attention : trente-sept sur les seuls chantiers de stades, sans tenir compte des morts survenues sur d’autres projets qui sont inséparables du grand festival de football autour duquel le Qatar bâtit son futur depuis plus d’une décennie. La Coupe du Monde de 2022, ce n’est pas que des arènes rutilantes, c’est aussi de nouvelles infrastructures de transport, de nouveaux hôtels, et même une ville toute entière, Lusail City, qui pourra accueillir jusqu’à 450 000 habitants – alors que la population actuelle de l’émirat n’est que de 2,8 millions de personnes, dont 300 000 seulement environ sont en possession d’un passeport qatari.

La défense peu convaincante de la FIFA

Rosenborg et quatre clubs norvégiens réclament un boycott du Mondial 2022

Rosenborg et quatre clubs norvégiens réclament un boycott du Mondial 2022

La Coupe du monde n’est pas un simple tournoi pour l’émirat. Plus qu’un horizon, La Coupe du monde est un tremplin, la fondation de la transformation du Qatar en une nation qui, espère-t-on à Doha, n’aura plus à craindre la fin de l’ère des hydrocarbures ; et n’aura plus à craindre ses voisins, protégé par la dimension globale que le sport – le football – lui aura fait prendre. Or, quand ce sont tous les projets associés au Mondial qui sont pris en compte, le coût humain est multiplié jusqu’à l’insoutenable. Une enquête de The Guardian a établi qu’au moins 6750 travailleurs immigrés, pour la plupart venus du Népal, d’Inde, du Bangladesh, du Pakistan et de Sri Lanka avaient péri au Qatar depuis que Sepp Blatter révéla l’identité de l’hôte du Mondial de 2022, le 2 décembre 2010.
La FIFA, à qui le Guardian a fait part de son enquête, a répondu que, « avec les mesures de santé et de sécurité très rigoureuses en place… la fréquence des accidents sur les chantiers de la Coupe du monde est basse, comparé aux autres grands projets de construction dans le monde« . D’où la FIFA tire ses statistiques, et à qui ou à quoi elle compare le bilan des accidents mortels survenus au Qatar, on l’ignore ; et, évidemment, elle s’en tient aux trente-sept victimes recensées sur les stades en construction et eux seuls. Mais ces stades ne sont pas construits dans un vide. Les routes qui y mènent et les hôtels qui accueilleront le million et demi de supporters que le Comité Suprême de la Coupe du monde attend dans l’émirat font aussi partie de l’infrastructure du Mondial. Mourir dans leur construction, c’est toujours mourir pour le football.
Le Mondial 2022 au Qatar, plus que jamais "une erreur" ?

La gronde vient de Scandinavie

Si la FIFA n’a rien trouvé à redire, il en va autrement des ONG de défense des droits de l’homme et, désormais, en Scandinavie, de quelques acteurs de moins en moins isolés du monde du football.

A la suite d’articles publiés dans l’hebdomadaire Tipsbladet et de l’appel au boycott de Qatar 2022 par le politicien radical Jens Rohde, des supporters de plusieurs grands clubs danois, dont le FC Copenhague, Brondby, et Aalborg ont lancé une pétition qu’ils espèrent voir conduire à un débat parlementaire sur le boycott de la Coupe du monde de 2022 par le Danemark. Le sélectionneur danois Kasper Hjulmand a indiqué qu’il respecterait la volonté de ceux de ses joueurs qui refuseraient de participer à la compétition, et le fan power, ça compte au Danemark : le FC Copenhague a dû annuler un stage à Dubai après les protestations de supporters qui refusaient que leur club serve de caution à un autre pays accusé de violations des droits de l’homme.

En Norvège, ce sont quatre clubs, et pas des moindres, qui se sont placés en première ligne de la campagne. Ce 26 février, suite à la publication de l’enquête du Guardian, sous la pression des supporters, c’est tout d’abord Tromsø, club de D1, qui a formellement demandé à sa fédération de boycotter un Mondial pour lequel la Norvège de Haaland, King, Sorløth et Odegaard a une vraie chance de se qualifier au vu de la composition de son groupe. Quelques heures plus tard, un autre club de Eliteserien, Strømsgodset emboîtait le pas, vite suivi par un troisième club de D1, et pas le moindre, Viking FK. Ce lundi, au tour de Odds Ballklub, le doyen des clubs norvégiens, de suivre leur exemple, et d’autres suivront, assure-t-on du côté des activistes. La fédération norvégienne pourrait-elle résister à la pression si le mouvement en faveur du boycott continuait de prendre de l’ampleur – ce qui semble devoir être le cas ? Vraisemblablement pas.
Erling Haaland avec la sélection norvégienne, en octobre 2020 à Oslo

Qui détient le pouvoir de coercition ?

On dira : « La Norvège, c’est quoi ? » Comme Staline a pu dire à Laval : « Le Pape… combien de divisions ? » Si on parlait de l’Allemagne, du Brésil…ou de la France, ce serait autre chose. Or il serait pour le moins étonnant que l’un de ces ténors prenne une telle décision. Sacrés Scandinaves, toujours là pour donner la leçon, du haut de leurs principes, de leurs libertés et de leurs démocraties. Une Coupe du monde sans la Norvège, ou le Danemark, personne ne s’en soucierait ; un Qatar sans Coupe du monde, par contre…
Mais si l’on dit cela, on oublie ce qui constitue l’essentiel : que, pour la première fois, sous la pression des fans et de leurs clubs, une fédération aurait choisi – probablement au risque d’une suspension de la FIFA – de dire « non ». Bien des compétitions ont fait l’objet de boycotts dans l’histoire du sport, les Jeux Olympiques en particulier. Mais à chaque fois que le boycott avait eu lieu, Montréal 1976, Moscou 1980, etc, ç’avait été suite aux décisions de gouvernements, pas d’associations sportives et encore moins de supporters. Le Mondial argentin de 1978 avait suscité des états d’âme (chez Michel Hidalgo, entre autres), mais les rebelles avaient fini par obtempérer.

Révolte ascendante

Cette fois-ci, c’est différent. Le mouvement, même s’il se limite pour le moment à deux pays scandinaves, vient de la base, de ce supportérisme qui gagne du terrain dans toute l’Europe. Il sera intéressant, par exemple, de voir comment les ultras allemands, y compris et surtout ceux du Bayern, dont les liens avec le Qatar créent tant de tensions au sein des membres du club, réagiraient si leurs amis norvégiens obtenaient gain de cause.
La tentation sera, une fois de plus, de détourner le regard, de se boucher les oreilles et de rester muet, comme on l’a toujours fait jusque-là, et d’aller au stade en oubliant que nous y serons accompagnés de fantômes. Ce que font les supporters danois et norvégiens relève peut-être du don quichottisme. Mais ils auront eu moins le mérite de nous rappeler qu’il s’agit bien d’un choix. Ils ont fait le leur. Ayons le courage de faire le nôtre.
Didier Deschamps - France

Qatar-2022 – Platini : « La Coupe du monde au Qatar,? Bien sûr que c’est une bonne décision »

Par AFP Publié par Eurosport le 05/03/2021

COUPE DU MONDE 2022 – Michel Platini ne regrette rien autour de l’attribution du Mondial 2022 au Qatar si ce n’est d’avoir eu l’honnêteté de dévoiler son vote. Pour lui, cette décision est bonne et il s’attend à une belle Coupe du monde.

Michel Platini est arrivé en Suisse pour plaider sa cause devant la justice
Michel Platini est arrivé en Suisse pour plaider sa cause devant la justice
Michel Platini, ex-patron français du football européen, affirme « ne pas s’interdire » un retour aux responsabilités sportives et défend l’attribution du Mondial-2022 au Qatar, vendredi dans une interview au quotidien allemand Die Welt.
Le triple Ballon d’or est visé depuis 2015 par une procédure de la justice suisse pour un paiement suspect de 2 millions de francs suisses par Sepp Blatter, alors président de la Fifa. Il est depuis écarté de toutes responsabilités sportives. Pense-t-il à un éventuel retour? « Laissez-moi d’abord y réfléchir en toute tranquillité, rien ne presse« , répond l’ancien président de l’UEFA. « Je ne m’interdis rien. Si je pense que c’est bon pour le football et que je peux encore être utile, alors je m’y engagerai pleinement« , ajoute Platini, précisant que « ce sera alors la dernière fois« . « Sinon, je resterai à la maison et continuerai ma retraite« .
L’ancien international français défend de nouveau l’attribution de la Coupe du monde 2022 au Qatar, qu’il soutenait quand il était aux responsabilités, même si depuis il dit n’avoir eu « que des problèmes sur les bras« . Cette attribution était-elle une « bonne décision » ? « Bien sûr« , répond Platini. « Les pays arabes ont déjà posé leur candidature à dix reprises pour accueillir la Coupe du monde. C’est important pour le développement du football et c’est exactement la raison pour laquelle j’ai voté pour eux, à condition que la Coupe du monde ait lieu en décembre, ce qui sera le cas« , détaille-t-il.

« Je m’attends à une très bonne Coupe du monde, à 25 degrés, la climatisation ne sera pas nécessaire« , veut croire l’ancien patron du football européen. « Mon seul regret est d’avoir été trop gentil, trop transparent, parce que j’ai dit ouvertement que j’avais voté pour le Qatar. Je suis le seul des quinze à l’avoir admis, et je n’ai eu des ennuis depuis« , regrette l’ancien meneur de jeu des Bleus.


Comprendre les polémiques sur la Coupe du monde 2022 au Qatar en cinq graphiques

Le comité exécutif de la Fifa doit annoncer, jeudi, que le Mondial de football sera bien organisé au Qatar en hiver. Une des nombreuses polémiques qui entourent cette compétition.

Un article signé Christophe Rauzy  publié par France Info
Une représentation, vu des tribunes, du futur stade d'Al-Khor (Qatar), qui doit êtreconstruit à l'occasion de la Coupe du monde de football 2022. ( AFP / JEROEN JUMELET)

La Fifa va mettre un terme à un débat qui secoue le monde du football depuis plus de cinq ans. L’organisation qui gère le football mondial doit rendre sa décision, jeudi 19 mars à Zurich (Suisse), concernant l’opportunité d’organiser pour la première fois une Coupe du monde en hiver, à l’occasion du mondial 2022 au Qatar. Une décision liée aux températures caniculaires qui règnent en été dans cet émirat du Moyen-Orient. Il s’agit d’une des nombreuses polémiques qui entourent cette compétition, que francetv info expose à travers cinq infographies.

Jouer au foot dans le désert, oui… mais en hiver

La Coupe du monde au Qatar inquiète de nombreux acteurs du football. Non pas à cause des soupçons de corruption qui planent au-dessus de la candidature qatarie, choisie par la Fifa en 2010, mais à cause des températures extrêmes qui règnent chaque année dans ce pays entre mai et septembre. Traditionnellement, une Coupe du monde commence début juin et s’achève au maximum à la mi-juillet. Au Qatar, ce calendrier impliquerait de jouer sous un soleil de plomb avec des températures dépassant les 41,5°C.

Dès que le Qatar a été choisi, des nations se sont inquiétées pour les conditions de jeu. L’organisation qatarie a alors mis en avant la construction de stades couverts et climatisés. Mais le bilan écologique désastreux de cette option, et la perspective d’exposer le public à une chaleur difficilement supportable en dehors des stades, ont poussé la Fifa à envisager un Mondial hivernal. Un groupe de travail a alors opté pour une Coupe du monde organisée du 26 novembre au 23 décembre 2022. Objectif : impacter le moins possible les championnats nationaux et continentaux.

Mais la levée de boucliers a été générale chez les organisateurs des ligues nationales, notamment en Europe. « C’est la pire des solutions », estime Frédéric Thiriez, patron de la Ligue de football professionnel (LFP) en France. Les dates retenues pour ce Mondial pourraient, en effet, perturber les championnats majeurs du football comme l’Angleterre, l’Espagne, la France, l’Italie et l’Allemagne avec une dizaine de journées qui seraient décalées. Sans oublier que la plupart des championnats du monde, tous calés sur le calendrier traditionnel de la Coupe du monde, seraient également touchés.

Les adversaires d’une Coupe du monde hivernale estiment qu’interrompre les ligues nationales pendant sept semaines (trois semaines de préparation et quatre de compétition) pourrait fausser les grands championnats et les rendre moins attractifs pour les diffuseurs, et donc menacer leur modèle économique. Les « petits » championnats, qui ne s’arrêteront pas pendant le Mondial, risquent, eux, de souffrir encore plus de la concurrence des matchs de la Coupe du monde, qui ont rassemblé 3,2 milliards de téléspectateurs en 2010.

Un projet de Mondial organisé en mai 2022 a bien été proposé, sans succès. Du coup, les acteurs qui se sentent lésés comptent réclamer des compensations financières. Une perspective qui révolte Philippe Piat, le président de la Fifpro, le syndicat des joueurs : « Ce sont tous des faux-culs ! Je sais que tout le monde finira par être d’accord si on leur donne du fric! », s’est-il emporté le 11 mars dans France football.

Des dépenses pharaoniques

En 2014, le Brésil a été secoué par de violentes manifestations, suscitées en partie par les 14,1 milliards d’euros investis par le pays pour l’organisation du Mondial. En 2010, en Afrique du Sud, de nombreuses polémiques avaient éclaté après le dépassement de plus de 1 000% du budget prévu pour la Coupe du monde. Au Qatar, les 188,9 milliards d’euros d’investissements envisagés, un record pour un tel événement, pourraient, à leur tour, susciter de nombreuses critiques. D’autant que ces investissements représentent un montant équivalent au niveau actuel du PIB annuel du Qatar, évalué à 190 milliards d’euros

Le gigantisme du projet qatari, qui prévoit notamment la création d’une ville entière baptisée Lusail, décrite par Business Insider (en anglais), aiguise les appétits des firmes étrangères, notamment dans le BTP. Mais comme l’expliquait le quotidien Les Echos en 2013, les contrats sont difficiles à négocier, les Qataris privilégiant les offres à bas coût turques, indiennes et chinoises notamment, pour maximiser leurs profits.

Des ouvriers en danger

Conditions de travail et d’hébergement indignes, retards de salaire de plus d’un an, vols de passeport, les critiques visant les chantiers de la Coupe du monde au Qatar sont nombreuses. Au-delà des accusations d’esclavage, c’est surtout le nombre d’ouvriers morts sur les chantiers qui choque : 1 200 victimes, dont de nombreux Népalais et Indiens, selon la Confédération syndicale internationale. Jusque-là, de tels drames avaient déjà marqué les chantiers des grandes compétitions sportives récentes, mais ils étaient limités.

Le comité d’organisation qatari a rejeté en bloc ces accusations et nié ces chiffres. Mais la Fifa se montre bien plus sceptique, poussant le Qatar à annoncer des réformes concernant le traitement des travailleurs. Dernier exemple en date, dimanche 15 mars, le président Sepp Blatter a incité directement l’émir à « faire plus » pour les ouvriers, relate RTL.

Construire des centaines d’hôtels, mission impossible ?

C’est un défi herculéen qui attend le Qatar en 2022. L’émirat doit être prêt à accueillir les 4 millions de touristes attendus, c’est-à-dire près du double de la population du pays (2,1 millions d’habitants). En 2010, dans son dossier de candidature, le comité d’organisation a annoncé qu’il comptait proposer 100 000 chambres d’hôtels, soit plus du double de ce qui existe actuellement. De quoi impressionner la Fifa, qui fixait un seuil minimum acceptable à 60 000 chambres.

Mais selon le cabinet Deloitte, qui a conduit une étude sur le marché hôtelier qatari, l’objectif risque de ne pas être atteint. Les experts estiment que le pays ne devrait pas proposer plus de 38 000 chambres d’ici à 2022.

En cause, le taux d’occupation actuel des hôtels au Qatar. Si la fréquentation touristique du pays a bien augmenté drastiquement depuis 2010, avec 1,3 million de touristes en 2013 (+9% par rapport à 2012), la demande n’est pas encore suffisante pour rentabiliser les dizaines d’hôtels qui doivent sortir de terre pour le Mondial. En clair, si d’ici à 2022 le Qatar n’attire pas plus de touristes, il sera impossible d’assurer la disponibilité des 100 000 chambres promises, avec le risque de créer une certaine pagaille chez les supporters venus du monde entier pour le Mondial. Selon Deloitte, le Qatar est dores et déjà en retard : il reste encore 210 hôtels à bâtir dans le pays d’ici à 2022, soit 30 par an. Or, en 2012, seuls 12 établissements ont été construits.

Comme le souligne Doha News (en anglais), les infrastructures touristiques suscitent une autre polémique : après le Mondial, à quoi serviront ces dizaines de milliers de chambres vides dans des villes dénuées d’attractions touristiques ? Les autorités qataries ont refusé de répondre, annonçant seulement que des milliards de riyals (la monnaie du Qatar) seraient dépensés pour atteindre un objectif encore plus démesuré : attirer 7,4 millions de touristes par an en 2030.


Le  boycott vu par Guillaume Meurice sur France Inter …

A suivre …

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