11 septembre 1973, Salvadore Allende …

D’après photo Marin Bénetti / AFP

Le 11 septembre 1973, Salvador Allende, président démocratiquement élu du Chili, mourait lors du coup d’État militaire ourdi et financé depuis les États-Unis.  Au moins 3 800 morts ou disparus et plus de 37 000 torturés, des centaines de milliers de Chiliens contraints à l’exil : une aube noire se leva sur le Chili de Pinochet … 47 ans après,« on n’oublie pas, les plaies ouvertes sont les brèches d’où germent la colère et l’espoir. »

« Eux savent. Les anciens militaires. Piñera les relâche au compte goutte, modulant le cathéter de l empathie. Eux savent, mais on les libère, pour cause de fausse sénilité.
Ils passent de leur silence en prison dorée, à leur silence dans une maison dorée, entourés de leur famille dorée, regardant par la fenêtre déambuler les domestiques poussant les carrosses dorés des progénitures engendrées pendant leur silence mortifère. Ils nous tirent la langue, leur dentier pourrait en tomber. Ils crachent à la gueule de la société Chilienne toute entière. Les responsables de ce massacre, de cette déchirure, continuent de gouverner. Ils refusent une nouvelle constitution et osent utiliser « El derecho de vivir en paz », chanson de Victor Jara pour semer leur haine et la confusion de l’histoire. Víctor Jara, criblé de 44 balles de pistolet automatique. Ils insultent leur histoire, et celle des autres aussi. Les histoires de plus loin, et ça fait mal. Hier dans le Journal, un politique expliquait simplement, « qu’être communiste, c’est soutenir Al Quaeda ». Ils sont une honte.
Ce sont des assassins. A tous les vieux bâtards assassins, il est grand temps de rompre le pacte de silence. Être disparu, c’est mourir deux fois. 11 septembre 1973. On n’oublie pas, les plaies ouvertes sont les brèches d’où germent la colère et l’espoir. Ce soir, seule domine la colère. »
Kevin Morizur
Valparaiso, le 11 septembre 2020

+EN COMPLEMENT : 5’20 » d’images prises le 5 décembre 2009 sur la Plaza Brazil . Ce jour là,  des milliers de personnes accompagnent au cimetière principal de Santiago du Chili la dépouille mortelle du chanteur Victor Jara assassiné 36 ans plus tôt …


… et l’espoir de « la nueva Constitución » !

Au Chili, s’annonce le scrutin le plus important depuis plusieurs décennies : le référendum sur une nouvelle constitution. Le 25 octobre prochain les citoyens seront appelés à voter « pour » ou « contre » l’abandon de la constitution actuelle, héritée de la dictature du général Pinochet.


Le témoignage d’un Breton, 47 ans après …
De Santiago à Lannion, Michel Blin a vécu le coup d’État d’Augusto Pinochet au Chili

Le 11 septembre 1973, un coup d’État militaire renverse le président socialiste du Chili Salvador Allende, qui n’y survit pas. S’en suit la dictature d’Augusto Pinochet. Présent à Santiago à ce moment là, le Breton Michel Blin a été arrêté par l’armée, il témoigne.

Michel Blin, aujourd'hui et en 1973, a connu l'enfer pendant le coup d'état à Santiago.
Michel Blin, aujourd’hui et en 1973, a connu l’enfer pendant le coup d’état à Santiago.© Vincent Bars – France Télévisions

C’était il y a 47 ans. À l’époque, Michel Blin est un étudiant en agronomie de 24 ans était venu voir de ses propres yeux la réforme agraire engagée par le gouvernement socialiste de Salvador Allende.
Ce médecin de profession arrive à la tête du pays lors des présidentielles de 1970 au cœur de la guerre froide, grâce à un programme d’union de la gauche. Les États-Unis, qui en ont assez d’un seul Cuba sur « leur » continent s’opposent vite au nouveau régime chilien.

« Mon hôtel donnait directement sur le palais présidentiel« 

Trois ans plus tard, l’armée chilienne fomente un coup d’État contre le président élu. Soutenue en sous-main par la CIA, la junte est menée par Augusto Pinochet. Ce lointain descendant de Bretons a fait carrière dans l’armée jusqu’à devenir commandant en chef de celle-ci à la veille du coup d’État, avec la confiance d’Allende.
Il rejoint le complot in extremis quelques jours avant sa mise en exécution.

Ce 11 septembre 1973, l’ordre est donné de prendre d’assaut le palais de la Moneda, résidence du président de la République du Chili.

Michel Blin assiste à la scène depuis sa chambre d’hôtel. « Il donnait directement sur le palais présidentiel, détaille l’étudiant de l’époque. J’ai vu les tanks s’approcher du palais, au départ je croyais qu’ils venaient défendre le président Allende. Mais après les avions ont bombardé la Moneda. »

Retranché dans le palais avec ses fidèles, Salvador Allende finira par se suicider avec son AK-47 offerte par Fidel Castro. Il refusa d’être exfiltré : « le président de la République élu par le peuple ne se rend pas« .

Quinze jours de détention au Stade National

Pour Michel Blin, la suite des événements va se compliquer. Deux jours après le coup d’État, des militaires investissent l’hôtel où il réside, perquisitionnent et l’arrête en compagnie des autres étrangers présents sur place.
Sans aucun motif connu, il suppose que « pour le nouveau régime, les étrangers présents au Chili étaient suspects, de potentiels guérilleros. »

Après une demi-journée au commissariat « les mains en l’air« , le prisonnier politique rejoint les autres détenus au Stade national. L’enceinte est transformée en camp pour environ 40 000 prisonniers. Certains y mourront.

Michel Blin y restera quinze jours avant d’être libéré grâce à la pression diplomatique française et l’aide la Croix Rouge Internationale. De retour en Bretagne, il laissera ce passage de sa vie traumatisant dans l’oubli jusqu’au 16 octobre 1998.

Engagement pour la mémoire des victimes

En effet, cette date de juin 1998 correspond à l’arrestation de l’ancien dictateur du Chili à Londres, huit ans après avoir lâché le pouvoir. Chez Michel Blin, cela a eu l’effet d’un déclic. « Comme un réveil vers l’action associative. J’ai contacté par la suite d’autres réfugiés politiques chiliens en France, qui sont devenus des amis. »

Aujourd’hui âgé de 70 ans passés, Michel Blin reste engagé pour la mémoire des victimes. Quelque chose qui prend son importance au vu des événements contestataires que traverse le Chili depuis 2019 où l’héritage de Pinochet pose encore question.

« D’après ce que je vois, une partie de la population reste d’accord avec la dictature et comprend le coup d’État, regrette l’ancien prisonnier politique. À la différence de l’Argentine, aucun bourreau n’a été jugé au Chili. »

De 1973 à 1990, le régime de Pinochet provoqua plus de 3 200 morts et disparus, plus de 38 000 torturés et des dizaines de milliers d’arrestations de dissidents.

Lire par ailleurs sur PrendreParti à propos de Salvadore Allende …

Avec Léo Ferré, « Réveiller Allende … »