La veillée singulière de Colin Chloé et Claude Nougaro chez les Pouliquen …

Un jour, Eric Le Corre est devenu Colin Chloé, Le Colin et la Chloé de Boris Vian. Un soir de solstice d’hiver, dans la grange agricole de chez les Pouliquen, il a sorti sa guitare comme pour mieux accompagner Jacques, le fils, à la tombée d’une nuit devenue singulière. « Vous voyez cette plume ? Eh bien, c’est une plume… d’ange. Mais rassurez vous, je ne vous demande pas de me croire, je ne vous le demande plus. Pourtant, écoutez encore une fois, une dernière fois, mon histoire « …

« C’est une plume d’ange et je te la donne. Montre-la autour de toi. Qu’un seul humain te croie et ce monde malheureux s’ouvrira au monde de la joie. Qu’un seul humain te croie avec ta plume d’ange. Adieu et souviens toi : la foi est plus belle que Dieu.  »

Alors, c’est Claude Nougaro en personne qui s’est invité dans la grange …

Avant que Colin Chloé ne nous entraîne … sur les traces de son Marin porté disparu  et retrouvé  le 29 septembre dernier dans La Chapelle de Brouennou  de Landeda …

en passant par le Portde Brest et  La Carène où « La terre nous attend … »

« La Terre nous attend
Les nappes les sources
Boiront notre sang
Le jus de nos bourses
Renaît la primevère
Du nouveau printemps
Au milieu du champ
Où la camarde prolifère

Aimons la vie mon amour
Aimons-nous chaque jour
Tous les matins de la Terre
S’en revient la mer

La Terre nous attend
Oh mes pauvres enfants
Et toute cette eau
Salée entre les dents
Nos rêves de chevaux
Iront errer
Dans l’humus détrempé
Des veines de terreau

La Terre nous attend
La gueule grande ouverte
La vermine offerte
Prendra le temps
De nous rogner la nuque
De remplir nos bouches
Pour nourrir les souches
De nos derniers sucs  »

Paroles : Colin Chloe

En ce 21 décembre où la nuit est la plus longue, et le jour le plus court, pouvions nous rêver mieux  pour fêter le réveil annoncé de la nature et de la vie et pour célébrer l’avènement  de …  « nos Vertes Années Kerhorres ! »

 


En savoir plus sur Colin Chloé

Il laisse parler les choses et aime les mots « clochards »

Quatre ans après Appeaux, le chanteur-compositeur Colin Chloé revient avec un nouvel album, Au ciel. « Parce que la musique, c’est essentiel. »

Colin Chloé : « L'enregistrement a été une semaine intense. »
Colin Chloé : « L’enregistrement a été une semaine intense. » |

Portrait

On l’imagine peu disert dans la vie quotidienne, mais quand il s’agit de convoquer la poésie, la littérature et la musique, ses yeux s’allument et la parole se fait fontaine. De jouvence, de vie.

Amoureux de la poésie

C’est ainsi qu’un jour, Eric Le Corre est devenu Colin Chloé. Le Colin et la Chloé de Boris Vian. Il égrène quelques noms de son panthéon. Guillevic, Perros, qui lui a inspiré Certains disent ; Char, « un puits sans fond » ; Quignard… « Je ne lis pas de livres qui parlent de divorces et d’éviers bouchés. Je cherche autre chose dans la littérature et dans la poésie, en général. En ce qui concerne les chansons, c’est pareil. »

À Brest depuis 16 ans, Colin Chloé vient de Lorient et de son Arsenal où il a commencé à travailler à 17 ans. Charpentier, puis technicien. Comme une suite logique depuis l’arrière-arrière grand-père. « Je suis arrivé dans un bureau, cela ne me plaisait pas. Je me suis barré. J’ai fait de la musique. »

Et puis, Lampaul-Plouarzel : « Sept ans de bonheur à m’occuper de ma fille, à faire de la musique, à marcher sur la côte. » C’est là qu’il trouve son écriture. À côté de cela, il reprend des études de littérature anglaise et un boulot technique à mi-temps. Colin Chloé cultive les oxymores.

Au ciel est l’album de la nécessité. Vivre sans la musique, impossible. Trois ans pour l’écrire. « Je suis un escargot en écriture. Je marche beaucoup et j’écris toujours en me promenant. Des petites phrases qui me viennent. Et quand j’ai une bonne phrase, j’ai une chanson. La mélodie arrive très vite après. »

Aucun détail n’est laissé au hasard. « Je voulais un son organique, électrique, sans clinquant. On est dans le médium, le rude, le minéral. » Un album qu’il a voulu vertical, dans le prolongement d’Appeaux qui était horizontal.

Une trilogie

Il nous prévient, le prochain, puisqu’il s’agit d’une trilogie, sera aérien. Sans oublier l’homme. La nature reste un prétexte pour parler de lui, pour l’approcher. Un homme un peu sauvage, très Walden. Une chose est sûre, c’est que Colin Chloé recherche l’épure. « J’essaie d’enlever les adjectifs. Les textes sont de moins en moins longs. Pour créer des ellipses encore plus flagrantes. » On ne peut que l’encourager dans cette direction, celle de « l’aridité », comme il dit. Celle qui laisse tomber l’explicite et le bavardage.

Trois titres ont démarré l’album, donné la direction. Au ciel, Walden et Fontaine. Des tempos variés. De l’espace. Et puis, cette voix qui rappelle celle de Bashung, qui vous prend là. Au ciel, le morceau éponyme, clôture cet opus comme une évidence, pour mieux l’ouvrir sur un ailleurs. « Alors/On laissera la Terre/Au vent/Qui nous invite »… Une chanson qui a pris son envol en studio avec des musiciens.

« Du lourd »

Pascal Humbert, 16 Horsepower et Detroit, à la basse et Yves-André Lefeuvre, Complot et Miossec, à la batterie. Du lourd. « Au départ, j’avais décidé de faire un album sans basse, parce que j’ai du mal à travailler avec d’autres personnes que des amis. »

Et voilà que, très proche de Bruno Green, le producteur, Humbert dit oui tout de suite au projet. « Cette confiance m’a remis sur les rails. Travailler avec des gens très talentueux et qui te disent que ce que tu fais est vachement bien… » C’est sûr, il y a de quoi donner un grand coup de canif dans les doutes.

« La terre nous attend/La gueule grande ouverte… » Nous, on plonge.

Au ciel de Colin Chloé, sorti le 7 avril chez Hasta Luego recordings.