En Bretagne, les éleveurs de porc industriel veulent organiser un « trail nature » en plein coeur d’une zone Natura 2000 … Au grand dam des défenseurs locaux de l’environnement qui dénoncent une « opération publicitaire de greenwashing au profit d’élevages particulièrement polluants ». La pétition appelant à boycotter « Pig & Run » affiche déjà plus de 22 000 signatures …
Une course au départ d’une porcherie : la dernière trouvaille de l’industrie porcine
Un article signé Chloé Richard dans Reporterre du 3 janvier 2025 …
Une course « nature et festive » et « qui envoie du pâté ». Dimanche 18 mai 2025, un trail un peu particulier va se dérouler le long de la rivière d’Étel dans le Morbihan : la course Pig & Run.
Pendant 23,5 km, les participants seront invités à cavaler « responsable ». « Le parcours traverse une zone Natura 2000, un environnement naturel exceptionnel. Alors, on court, on admire… mais surtout, on respecte la nature : pas de déchets par terre, sinon gare au cochon en colère ! » disent les organisateurs, qui ne sont autres que les éleveurs de porc industriel de Bretagne, regroupés sous l’égide du Comité régional porcin (CRP).
Tout au long de la course, qui a ouvert ses inscriptions mi-décembre et a affiché complet en quelques jours à peine, les 500 participants pourront se ravitailler en cochonnailles — forcément — et les gagnants pourront remporter leur poids en viande de porc. Sans oublier que le départ et l’arrivée se feront depuis une porcherie. « C’est une façon de discuter avec les gens de notre travail, du respect de l’environnement, du bien-être animal… » a déclaré auprès du journal local Le Télégramme Lydia Le Clère, éleveuse à Kerfourn et chargée de la communication pour le CRP. « Nous avons la légitimité pour en parler », a-t-elle ajouté.
« Cet événement est totalement décalé et hors de propos, ne serait-ce que sur la question de la qualité des eaux. Les élevages porcins ont une influence sur l’environnement. Sans oublier qu’on est ici dans un bassin ostréicole », rétorque Hervé Leroy, de l’association Bretagne vivante. Mais avec le Crédit agricole, le Crédit mutuel de Bretagne ou encore le label Le Porc Français et des entreprises de nutrition animale telles que Tromelin Nutrition ou Sanders en sponsors, la course ne va pas manquer de moyens.
« Pourquoi tous ces communicants interviennent-ils pour essayer de redorer le blason de cette profession ? » s’interroge Laurent Le Berre, membre d’Eaux et rivières de Bretagne et du collectif Stoppons l’extension d’Avel Vor, la mégaporcherie de Landunvez dans le Nord Finistère. Les pollutions engendrées par l’élevage intensif de porcs sont aujourd’hui bien connues : air pollué à l’ammoniac, marées d’algues vertes, ou encore, entre autres, bactéries type E. Coli qui se retrouvent dans les eaux de baignade. « Aller courir à pleins poumons dans des secteurs avec des élevages de porcs et des fosses à lisier qui émanent de l’ammoniac dans l’air, ça ne doit pas vraiment être super pour la santé », poursuit Laurent Le Berre.
Plus de 20 000 signatures contre la course
Une pétition a été lancée après l’annonce de cet événement dans la presse régionale en novembre, appelant à boycotter Pig & Run. Elle affichait déjà plus de 22 000 signatures le 3 janvier. « C’est une opération de greenwashing qui vise à associer le sport et la nature au lobby agricole porcin, dit Livie Chatelais, coureuse occasionnelle à l’initiative de cette pétition. C’est antithétique. »
« C’est de la pure publicité dans le sens négatif du terme. Les gens commencent à faire le lien entre les conséquences environnementales et l’élevage porcin. On fait avaler la pilule des effets secondaires du porc à travers un événement de communication qui donne envie », déplore Armelle Jaouen, membre du collectif Stoppons l’extension d’Avel Vor et attentive à la question des porcheries dans la région.
Reste à savoir si la course pourra ou non avoir lieu. Celle-ci se déroulant en partie dans une zone Natura 2000, « les organisateurs doivent déposer un dossier avec étude d’incidence, ce qui n’a pas encore été fait. Ce type de course, notamment au niveau du sentier côtier, peut entraîner un stress pour les oiseaux et un piétinement des chemins », souligne Hervé Leroy. Contacté par Reporterre, le CRP n’a pas donné suite à notre demande d’entretien.
Pig & Run : une nouvelle course entre nature et cochonnailles en mai dans la Ria d’Étel
Nouvelle course « nature et festive » de 23 km organisée en mai dans la Ria d’Étel, la Pig & Run partira d’une exploitation agricole et proposera des ravitaillements à base de cochonnaille.
Running. Pig & Run, dimanche 18 maiUne nouvelle course « nature et festive », sur le modèle du Marathon du Médoc, voit le jour dans le Morbihan. La première édition de la Pig & Run, « la course qui envoie du pâté », aura lieu le dimanche 18 mai, dans la Ria d’Étel.
Au programme : un parcours de 23,5 km au départ d’une exploitation agricole de Merlevenez, avec de la cochonnaille à chaque ravitaillement et « un grand banquet cochon grillé » en clôture. L’événement est organisé par les éleveurs de porcs bretons, sous l’égide du Comité régional porcin de Bretagne.
Site Internet : pig-run.bzh
La Pétition de Boycot de la course « Pig and Run » promue par le Comité Régional Porcin
La course « Pig and Run », organisée par le Comité Régional Porcin, est prévue le 18 mai 2025 à la Ria d’Etel. Cette course fait de la publicité pour le lobby agro-industriel de l’élevage porcin, une source majeure de pollution des eaux et des sols bretons.
Cette pollution est à l’origine des marées d’algues vertes qui rendent nos plages et cours d’eau inutilisables, causent des risques pour la santé humaine et animale et ont déjà causé de trop nombreuses morts – un fait tragiquement illustré dans la bande dessinée « Algues Vertes ».
Il faut mettre un terme à cette promotion irresponsable de pratiques environnementalement dommageables. Le lobby porcin n’a pas le droit de se faire de la publicité sur le dos des coureurs à pied.
En signant cette pétition, nous appelons à boycotter la course « Pig and Run » jusqu’à ce que des pratiques plus durables et respectueuses de l’environnement soient adoptées par le lobby porcin. Nous ne pouvons pas continuer à mettre en danger nos plages, nos rivières, et ultimement nos vies et celles des générations futures.