Sur un ton et dans un registre qui lui est cher, Bruno Schnebelin fondateur et directeur artistique de la Compagnie Ilotopie propose au mouvement du théâtre de rue « une réflexion matinale de printemps ». Il pointe notamment les limites des financements ministériels basés sur la théorie économique du « ruissellement » et qui consistent « à irriguer le structurant en disant que cela finira bien par abreuver des artistes » …
Arles le 7 Avril 2023.
« Ce qui fut un grand mouvement urbain et émancipateur, les théâtres de rues nés dans les années 70/80, fut doucement mais radicalement orienté dans une fonction de paix sociale par le ministère de la culture. La terminologie même de théâtre de rue lui fut confisquée pour un fourre tout « arts de la rue » dont le distractif et la prouesse seraient les ingrédients majeurs. Il y a un théâtre de classe et pas question qu’il y ait un théâtre populaire avec force artistique et politique mêlées ; pas question non plus de garder des artistes à diriger des CNAREP, il ne faudrait pas que ça puisse se revendiquer un jour des centres dramatiques d’espaces publics !
Sur les financements ministériels, la théorie économique du « ruissellement » tient bon la rampe, on irrigue le structurant en disant que cela finira bien par abreuver des artistes ; évidement, les structures coûtent de plus en plus cher dans leurs fonctionnements, et comme pour nos cours d’eau avec la casse climatique, les artistes s’assèchent alors qu’ils sont les producteurs, à l’image des paysans face aux distributeurs.
Que vive le courage des artistes. »
Bruno Schnebelin,
La « réflexion matinale » continue sur la liste rue et sur le facebook de Bruno par ici …
La Contribution de François Mary …
« Inattendu, spontané, subversif, surprenant, hors normes, hors cadre, le théâtre de rue a séduit un large public de part sa créativité, son inventivité, son imaginaire, sa liberté, en venant bousculer, interroger, porter un autre regard sur la ville, le paysage, l’environnement, le quotidien, le spectacle vivant. L’institution et l’administration l’ont approché, apprivoisé, rendu docile et sont parvenues à prendre l’ascendant, à lui créer des cases. Il a perdu une bonne partie de sa saveur transgressive, de sa poésie sauvage.
Cette évolution n’est pas nouvelle*, mais les événements de ces dernières années ont contribué par les mesures sécuritaires à accélérer et accentuer l’instauration des mesures de contrôle. Le dessin ci-dessous s’applique à de multiples domaines. Merci à tous les pionniers pour ces moments, ces souvenirs, ces traces.
A suivre les prochains chapitres de l’histoire des arts de la rue.
Bien à vous, » François Mary
* Lire par ailleurs « Petite et grande histoire du théâtre de rue », un entretien avec Jean Marie Songy réalisé en 2008 par Charlotte Granger .
La réaction de Caty Avram …
La réaction d’Antoine Le Menestrel …
« Merci pour cette réflexion inspirante
Je rebondis sur fourre tout « arts de la rue ». Celui-ci a aussi permis à des sportifs comme moi d’être accepté dans ce mouvement artistique.
J’ai apprécié que ce mouvement ne soit pas lié à une unique discipline mais à un espace avec lequel je m’accorde. C’est un mouvement qui génère de la diversité artistique.
Je me vois bien grimper puis chevaucher le dragon sécurité, vous avez cette version en dessin ? Verticalement » Antoine Le Menestrel
Lire par ailleurs sur PrendreParti à propos de Bruno Schnebelin et Ilotopie …