Dieu païen du football mondial …

D’après Photo La Mano Negra

Adulé et pardonné de tout à Naples, Diego Maradona le fut également dans le continent qui l’a vu naître.  Il fut sacré « dieu » le 22 juin 1986 par la grâce de la main inscrite sans vergogne en quart de finale du mondial mexicain contre l’Angleterre.« Il en a fait des exploits, mais reprendre ça comme fait d’arme principal, c’est terrible pour la morale et l’éthique sportives » tempère à juste raison et à contre courant Christian Gourcuff.
« L’Amérique latine n’avait pas de dieu jusqu’à l’arrivée des occidentaux. La pachamama, la terre nourricière était leur unique figure divine. A l’arrivée des espagnols, s’en est suivi 500 ans de colonisations atroces, de violences et de répression jusqu’au jour d’aujourd’hui …
Alors, lorsque l’Argentine gagne en 86 face aux inventeurs du football …, ce sont bien « les pauvres » qui gagnent contre les supposés « gentlemen » du football, et cela reste un instant gravé dans l’esprit de ce continent uni autour de Diego… »  explique Kévin depuis le Chili au moment de l’annonce du décès du « Maestro »... Aux yeux du peuple sud américain, la main de Diego et le but d’anthologie qui suivit ne seraient que « le juste retour des choses de la vie, une libération pour tout un continent, un droit de cité à l’échelle mondiale. La main de Maradona, ce sont les mains coupées par les colons pour annihiler les voleurs, les pauvres, les sans rien …, ceux là même que l’on retrouve dans les tentes place de la république il y a quelques jours. C’est la bravoure de tricher comme les grands pour signifier au monde entier que les inégalités, il faut les combattre, en jouant la tactique de l’ennemi… » Ce qu’aurait  fait Maradonna ce jour là ?  « Seulement montrer au monde entier que l’Amérique du sud ne se fera plus bouffer par les gentlemans qui te proposent un jeu « propre » alors qu’ils saccagent les terres où tu es né, où tu as grandi, et où tu peux changer l’ordre mondial en faisant danser un ballon. L’atrocité et le ravage causé par les occidentaux dans ce continent est beaucoup plus cruelle qu’un jeu de ballon… » conclut Kevin.
« C’est fabuleux qu’une tricherie absolument incroyable ait été transformée par les Argentins en truc christique », soulignait en 2009 le chanteur brestois Christophe Miossec dans les colonnes du Télégramme. « On est dans la religion, on n’est plus dans le foot « .

Christian Gourcuff  pour sa part déclaré :« Dès qu’une personne meurt, on lui trouve toutes les qualités. C’est très triste qu’une personne ou qu’un sportif décède. Soixante ans, c’est très jeune. Je l’ai admiré. Je l’ai vu évoluer dans ses meilleures années. Sur le plan technique, de la virtuosité, c’était phénoménal. Sans doute était-il un chic type, je ne le connaissais pas. Mais il a eu une vie qu’on ne peut pas mener en exemple. C’est pour ça qu’il faut relativiser. Ce n’est pas parce qu’il est décédé que c’est devenu un exemple pour la jeunesse. La UNE de L’Equipe ? C’est très malsain. Le but de la main qu’il marque est une entrave à la morale et à l’éthique sportive. Considérer ça comme un exploit et la revendication de la main de Dieu, j’ai trouvé ça complètement déplacé. Il en a fait des exploits. Reprendre ça comme principal fait d’armes, c’est pas terrible. Pour la morale, c’est même terrible… »

Diego Maradona n’a décidément pas fini de fasciner, de diviser et de faire parler de lui …


« Maradona vu par Kusturica »

Emir Kusturica célèbre dans un film l’incroyable histoire de Diego Maradona : héros sportif, Dieu vivant du football, artiste de génie, champion du peuple, idole déchue et modèle pour des générations du monde entier. De Buenos Aires à Naples – en passant par Cuba – le cinéaste retrace la vie de cet homme hors du commun, de ses humbles débuts à sa notoriété mondiale, de la plus spectaculaire ascension au déclin le plus profond. Un documentaire unique sur une légende vivante, filmé par son plus grand fan.

Kusturica aime filmer les monstres, les écorchés vifs et les marginaux. Il trouve chez eux plus d’humanité que chez n’importe quel autre personnage. Ce qui l’intéresse, c’est leur exubérance, leur caractère entier et leurs aspérités. Avec Diego, il a été servi et en a même fait les frais, comme l’illustre une scène hallucinante, révélatrice des problèmes qui ont émaillé ce tournage hors norme. Lors de leur première rencontre au domicile de Maradona, celui-ci accueille le Serbe à bras ouverts pendant toute une soirée. Avant de partir, Kusturica le salue et lui rappelle leur rendez-vous convenu le lendemain matin. Le lendemain donc, le cinéaste poireaute et s’impatiente gentiment avec son équipe de tournage devant la maison de la star. Maradona sort enfin, salue brièvement le cinéaste puis file directement dans sa voiture, remonte les vitres teintées et le laisse sur place sans lui dire un traître mot. Le sourire à la fois amusé et désabusé du cinéaste vaut le détour …

Un extrait vidéo de 18’22 » du film « Maradona par Kusturica » …

Passionné de foot,Manu Chao est fan de Diego Armando Maradona et lui a notamment composé deux chansons …


Depuis son plus jeune âge à Sèvres et Boulogne-Billancourt, Manu Chao est un gamin dévoré par la passion du foot. C’est donc naturellement qu’il écrit « Santa Maradona« , sorti en 1994 sur « Casa Babylon« , qui sera, on l’ignore encore, le dernier album de La Mano Negra.

Le morceau est un hommage bien sûr au « Pibe de Oro« . L’Argentin est alors sur le point de réaliser un ahurissant come-back lors de la Coupe du Monde 1994 aux Etats Unis. Le morceau de La Mano Negra, très agressif, dénonce le virage du fric et de la violence pris par le ballon rond, et en appelle à Maradona pour sauver ce qui peut l’être. Las, le joueur argentin se fera jeter du Mondial américain, pris en flagrant délit de dopage.

« La vida tombola »
Dix ans passent. Manu Chao reçoit un coup de fil du réalisateur serbe Emir Kusturica. Celui-ci est sur le point de réaliser un documentaire sur le joueur argentin et aimerait bien utiliser « Santa Maradona« . Le musicien n’est pas vraiment séduit par l’idée. Le morceau lui semble daté, violent et donc peu propice à un hommage au Pibe de Oro. D’autant plus qu’il est en train de composer un nouveau morceau à la gloire de Diego, « La vida tombola« .

Manu CHao Maradona Kusturica

Mais Kusturica insiste, il veut « Santa Maradona » et rien d’autre. Il ne prend même pas la peine d’écouter le nouveau morceau que lui a envoyé le clandestino. La légende raconte alors qu’un matin, tout à fait par hasard, Kusturica et Chao se croisent dans une station service à Mar Del Plata, en Argentine. Le chanteur n’hésite pas. Il s’empare de sa guitare et entonne « La vida tombola » devant Kusturica. Ce dernier est séduit tant par le culot du chanteur que par sa composition. « La vida tombola » clôturera en beauté le film « Maradona par Kusturica« .

Maradona raconté par Manu Chao

De passage à Marseille en juin 2009, Manu Chao ne pouvait pas passer sous silence sa rencontre avec le « Pibe de Oro ». Anecdotes racontées au Quotidien La Provence autour du documentaire réalisé par Emir Kusturica dans lequel le « Clandestino » chante pour Diego…


 Voir aussi « Maradona, un gamin en or »…

Un documentaire de 1h33′ diffusé par Arte jusqu’au 02/05/2021, un portrait de la légende du football, star absolue de l’Argentine, sacré jeune roi du ballon dès sa douzième année …