A vos marques… Prêts … Votez !

Photo JPierre Estournet

« Tragédie des femmes et hommes politiques, dits en campagne électorale dans la jungle de l’espace public des villes et des villages. A grand renfort de médias, de tracts, d’accords secrets, valses et autres danses de salons, retournements de situations et de vestes », la Cie Générik Vapeur présente  sa création  « En campagne «  au FAR de Morlaix 2007…Votes, votations, élections, référendums sont comme une déferlante sur la vie sociale et quotidienne : chacun y va de ses certitudes à coup de verbes, de charmes ou de menaces, le paysage se voit pris d’assaut, en mutations, transformations et métamorphoses… A vos marques… Prêts … Votez !

Ces petites urnes qui tracassent et qui pèsent tellement sur les hommes politiques. Qu’elles soient transparentes, parlantes ou blessantes elles causent. Et quand on les bourre trop, elles peuvent nous péter à la gueule !

Générik Vapeur – En Campagne

On pensait en avoir fini pour cette année avec les élections. Mais non ! A l’étage de l’hôtel, des élus potentiels saluent la foule présente. Parmi eux, Jean Croche, Elise Emoi, Mario Conde ou encore Bérengère Aït-Derbouz. Un fourgon blindé apparaît sur la place des otages et soudainement explose : des milliers de billets de banque à l’effigie des 8 candidats à cette élection s’envolent dans le ciel. C’est l’occasion pour eux de se lancer dans une déambulation pas comme les autres où tous essayent de vous attirer à eux par leur discours.

Une sécurité essentielle pour le pays pour Paul Flasche, un Mario Conde qui s’attire les faveurs du public par son sourire éclatant et son « Vous d’abord, moi devant », chacun a son programme défini. Par contre, tous semblent unanimes : « je suis le meilleur, votez pour moi ».

 

Après de nombreux arrêts, et une démonstration de leur endurance avec notamment un discours effectué au pas de course sur un tapis roulant, les chiffres commencent à parler. Et malheureusement, pour Paul Flasche et Jean Croche, ceux-ci ne cessent de baisser et ils doivent se retirer. La propagande visuelle a-t-elle marché ? Y-a-t-il un vainqueur ? On en doute car chaque homme politique disparaît à tour de rôle dans un cube qui explosera, percuté par un avion, une réminiscence d’une des dates les plus sombres de notre époque, symbole de l’impuissance des élus mondiaux à empêcher une telle catastrophe.

Il n’y a donc pas d’époque pour la parodie : démagogie, promesses, langue de bois, chacun y va de son amour, feint ou non, pour le peuple et promet qu’il sera leur guide.

Mais « En Campagne », c’est aussi une critique par la dérision du besoin de reconnaissance médiatique pour arriver au plus haut : « La science du pouvoir, c’est la médiatrie ». Avec le cube comme objet symbolique et récurrent, les politiques deviennent des esclaves lorsqu’ils poussent leur propre urne à un rythme régulier. « Le sondage permet de rouler le citoyen dans la farine », une critique envers l’image des candidats, à mille lieux sûrement de leur vraie personnalité. Et lorsque les écrans diffusent des images de crimes, d’éxécutions, de dictateurs tristement célèbres et de désolation, on réfléchit sur la portée de ces possibles élus prêts à tout pour atteindre le pouvoir.

« En Campagne », une création ironique sur ce monde politique qui semble perdre de sa valeur mais aussi une piste pour se battre et faire basculer la politique vers une dimension plus abordable, plus proche du peuple, en un mot, humaine.       Texte : Mathieu Nihouarn

 

 

 

 

 

 

 

Interview de Pierre Berthelot

Deux ans après, Générik Vapeur revient sur le FAR de Morlaix avec sa toute nouvelle création, « En Campagne ». Pour Pierre Berthelot, co-directeur artistique de la compagnie, il s’agit d’« une tragédie des hommes et des femmes politiques en campagne pendant la période électorale : comment ils peuvent passer du coq à l’âne, comment ils peuvent être amenés à défendre des opinions, comment ils peuvent être aussi amenés à en changer, comment ils peuvent parler d’eux-mêmes, comment ils peuvent se retrouver dans une relation d’individu à individu »…
Même si le sujet est sérieux et actuel, car « la France est en train de vivre un vrai changement », la compagnie rappelle qu’il s’agit avant tout d’un spectacle fictif et comique : « je n’ai pas envie que le public parte en se disant : “je n’ai plus envie de voter”. Nous disons juste qu’il y a certaines démocraties qui sont mises en danger. Comme je tiens à cette forme de pensée, si nous sommes provocateurs, c’est pour qu’il y ait un débat qui s’en suive avec les risques qu’il y a à dire les choses et à prendre la parole ».

« Durant cette période où il y a eu de nombreuses élections (présidentielles et législatives), on avait eu envie de vivre la campagne électorale d’une manière différente, c’est-à-dire de se servir de ce que l’on entendait ou voyait au quotidien et de se l’approprier un peu ». Pourtant, « En Campagne » ne se limite à la politique masculine française : « on y a associé des gens étrangers qui ont en même temps une relation de regard sur une forme de démocratie car il ne faut pas oublier que dans certains endroits la démocratie n’existe pas. Pour la première fois également, il y a l’arrivée de pas mal de femmes dans la compagnie pour qu’elles nous fassent partager ce regard en tant que femme, car notre société a aussi des problèmes de parité ». Et chaque candidat aura son propre quartier général sur place !!
Le spectacle débute par un fait divers banal : « les politiques aiment s’empiffrer d’un fait-divers pour être le plus tôt possible sur l’action et pouvoir s’en faire des gorges chaudes ».

Cet événement lance les comédiens dans une déambulation en espace public, forme chère et défendue par la compagnie, mais il y a également « des scènes fixes, où on récupère le public pour lui raconter des histoires afin de mieux repartir ». Tonique, cette création qui bouge et fait bouger n’est pas pour autant « un spectacle pousse-caddie; on prend le temps de dire les choses, on essaye de le faire partager au maximum ». On y retrouve d’ailleurs un élément récurrent propre à chaque vote, chaque élection : l’urne, « dans lequel on peut mettre toutes sortes de choses ». Une scène cubique, des urnes, « l’urne cathodique », le rubik’s cube qui peut nous permettre de « construire et de déconstruire »… La symbolique de l’objet est présente tout au long du spectacle.

Les politiques d’« En Campagne » ont déjà pu se balader et tester leur popularité, notamment dans les rues de France ( pour la première fois à la veille du second tour des législatives !), et de Pologne : « La création a été bien reçue. On reste agréablement surpris de la réaction des gens ». Et les personnes visées, qu’en pensent-elles ? « Ils ont serré les dents, c’était aussi le but recherché, mais ils ne nous ont pas assassiné. Ils l’ont vécu comme ils peuvent vivre une caricature et ce n’est pas plus mal ».
Mais étant donné la jeunesse de la création, « c’est un spectacle qui a besoin de maturité, il est en train de se construire et on fait en sorte de lui donner un peu plus d’étoffe à chaque fois ». « En Campagne » se doit d’être un spectacle qui plaît mais qui donne également l’occasion de réagir : «  j’ose espérer que c’est un spectacle qui fait causer »… Début de réponse le jeudi 9 août à 20h03.

Merci à Pierre Berthelot de m’avoir accordé quelques minutes afin de me présenter « En Campagne ».

Texte : Mathieu Nihouarn

 

Jour de campagne au marché de Locquirec

Mercredi 8 août, les candidats repartaient « En Campagne » pour convaincre certains indécis de voter pour eux. Quoi de mieux qu’un marché bondé pour rencontrer le plus de monde ? Et voilà donc les 8 candidats la veille d’une première soirée décisive qui se lancent à travers les multiples échoppes du marché de Locquirec sous un soleil de plomb. Infatigables, ils serrent de nombreuses mains, acceptent les différents présents des commerçants et tentent de convaincre les plus sceptiques.Autour des odeurs affriolantes de paëllas ou de saucisson, les politiques n’oublient pas de glisser un mot aux vendeurs et de distribuer leurs cartes personnelles, tous plus énergiques et souriants les uns que les autres, à part Jean Croche qui semble avoir fait des excès la veille et qui tangue dans les rues du marché, toujours dans un état second (il sera d’ailleurs obligé de faire une sieste sur un matelas gracieusement prêté).

 

Après cette prise de contact avec la population, les prétendants se rendent tous à la mairie afin d’être reçus par monsieur le maire de Locquirec qui tient à les remercier d’être venus égayer le marché. Et chacun y va de son petit mot ou de sa photo afin d’influencer le maire dans son choix. Et le vôtre, il est fait ? Vous savez qui peut nous proposer une vrai solution d’avenir durable ? Alors, venez déposez votre billet dans l’urne ce soir à 20h03, place des otages !

 

Texte : Mathieu Nihouarn