Danielle Messia, de la main gauche …

Que reste-t-il, aujourd’hui, de Danielle Messia ? Au minimum, une chanson , et quelle chanson  ! « De la main gauche »
« Je t’écris De la main gauche
Celle qui n’a jamais parlé
Elle hésite, elle est si gauche
Que je l’ai toujours cachée
Je la mettais dans ma poche
Et là elle broyait du noir.
Elle jouait avec les croches
Et s’inventait des histoires  …

« Je t’écris de la main gauche
Celle qui n’a jamais compté
C’est celle qui faisait des fautes
Du moins on l’a racontéJe m’efforçais de la perdre
Pour trouver le droit chemin
Une vie sans grand mystère
Où l’on ne se donne pas la mainDes mots dans la marge étroite
Tout tremblant qui font des dessins
Je me sens si maladroite
Et pourtant je me sens bien

Tiens voilà, c’est ma détresse
Tiens voilà, c’est la vérité
Je n’ai jamais eu d’adresse
Rien qu’une fausse identité

Je t’écris de la main bête
Qui n’a pas le poing serré
Pour la guerre elle n’est pas prête
Pour le pouvoir n’est pas douée

Voilà que je la découvre
Comme un trésor oublié
Une vue que je recouvre
Pour les sentiers égarés

On prend tous la ligne droite
C’est plus court, oh oui, c’est plus court
On voit pas qu’elle est étroite
Qu’il y’a plus de place pour l’amour

Je voulais dire que je t’aime
Sans espoir et sans regrets
Je voulais dire que je t’aime, t’aime
Parce que ça semble vrai

Danielle Messia
Source : Musixmatch


13 juin 1985 à Quimper, l’animateur de radio Gérard Classe s’apprête à entrer en studio à RBO …

Il reste sans voix lorsqu’une infirmière lui apprend, au téléphone, le décès de la chanteuse Danielle Messia, emportée par un cancer à 28 ans. « Comme un goût d’inachevé. Je trouvais injuste qu’elle parte si tôt alors qu’elle décollait », se souvient celui qui dit lui avoir consacré 34 ans de sa vie ».      Lire la suite de cet article dans Le Télegramme du 30 mai 2015


Plus de vingt ans après sa mort, la sortie d’un album live réveille le souvenir d’une artiste et de ses belles chansons, notamment « De la main gauche »…


Lire l’article de Bertrand Dicale daté du pour RFI

Qui était Danielle Messia ?
Extrait de Paroles et Musique, septembre 1985

L’histoire que nous raconte ce long article de Richard Cannavo (tous les passages en italique dans ce billet sont extraits de cet article, qui m’a servi de point d’appui) est celle d’une série d’épreuves, d’une vaine quête de la reconnaissance, menée avec obstination, mais sans aucun succès, par une artiste pourtant talentueuse, mais qui a souvent chanté, durant sa courte vie, devant des salles vides…

Née le 27 octobre 1956, Danielle Messia avait d’abord joué du violon, vers l’âge de 20 ans, dans un groupe folk de la région d’Orléans, Grattons Labeurs. » La communauté, c’était quelque chose de très rassurant, on partageait les mêmes idéaux, il y avait plein de copains. Cela correspondait aussi à l’idée d’un autre monde, que nous devions construire ailleurs, en marge. Un monde pur, sans pollution… Moi, je pensais que c’était là ma vraie famille... »

Dans le même temps, elle étudie l’histoire, à l’Université d’Orléans : »J’adorais mes études d’histoire parce que ça ne sert à rien, c’est gratuit, et c’est beau, comme la musique. »

Comme tant d’autres, elle finira, pourtant, par quitter cette communauté, pour « monter » à Paris:

« Je commençais à étouffer un peu ; il n’y avait pas du tout de place, là-dedans, pour l’expression individuelle« .

Hélas, malgré sa rencontre avec Môrice Bénin, qui la soutient, malgré sa voix si prenante, et ses textes de grande qualité, elle ne rencontrera jamais le succès. Tous les cabarets parisiens dans lesquels elle se présente la refusent. Un seul accepte de la programmer, à la fin de l’année 1979.

Enfin sa chance ?
Rien du tout !

Il ne vient personne.
Chaque soir, elle balance ses mots de fièvre devant une salle désespérément vide. « C’était les fêtes et, dans ma mansarde, toute seule, je traversais une sacrée déprime … »

Cette mansarde est une chambre de bonne située, cela ne s’invente pas, pour celle qui chante Le paradis des Musiciens…

Ce n’est qu’au début des années 1980 qu’elle parvient à sortir deux disques, et à se produire à La Cigale, puis au théâtre d’Edgar. Malheureusement, le public n’est toujours pas au rendez-vous.

Parfois, avec les cinq musiciens qui l’accompagnent, elle doit chanter devant…
Quatre spectateurs !

En 1984, enfin, elle fait un passage remarqué au printemps de Bourges.

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(Photographie publiée dans Paroles et Musique numéro 41)

Et le 22 juin 1985, elle est programmé dans l’émission de Michel Drucker, Champs Elysées .

Hélas, elle décède le 13 juin, quelques jours avant son passage dans cette émission qui l’aurait fait connaître du grand public.

Jusqu’au bout, elle avait lutté contre la leucémie, espérant pouvoir être au rendez-vous:

« Elle s’est battue jusqu’au bout, elle  voulait faire cette émission », raconte sa soeur Cécile.

Elle s’inquiétait tout le temps: « Est-ce que j’y arriverai ? Est-ce que je tiendrai dans les conditions du direct ? »

Danielle n’a jamais éprouvé d’amertume face à son manque de réussite, c’était plutôt un doute. Jusqu’à la fin, elle a douté, elle craignait de n’atteindre jamais le grand public, de demeurer toujours marginale, et c’était sa grande tristesse.

(…)

Quand elle était dans sa chambre stérile à l’hôpital, (…) Elle ne pouvait pas se lever, elle ne pouvait pas marcher tant elle était faible, c’était atroce !

Finalement, son corps n’a pas pu suivre cette volonté formidable qu’elle avait, il était trop épuisé.

Cela semble tellement injuste, tellement mal fait: elle disparaît au moment où tout allait se déclencher…

L’envie de cette émission, ça a été sa dernière grande bataille, et son repos, finalement, aura été de dire: « Je ne peux plus… Je n’y arriverai pas… » Mais elle voulait que personne ne le sache, et surtout pas dans le métier. C’était la consigne: il fallait dire qu’elle était en tournée, ou en vacances, mais surtout pas à l’hôpital !  »

Que reste-t-il, aujourd’hui, de Danielle Messia ?
Une tombe, discrète, au Père Lachaise.
Il n’y avait pas la foule lors de son enterrement…

 

Source Wikipedia

Danielle Messia, née Danielle Mashiah le à Tel Aviv-Jaffa (Israël) et morte le à Villejuif (Val-de-Marne)1, est une chanteuse française.
Auteure-compositrice-interprète à la sensibilité exacerbée, elle meurt à 28 ans des suites d’une leucémie.

Biographie

Danielle Mashiah naît à Tel Aviv-Jaffa en Israël, le 27 octobre 1956. En 1958, ses parents s’installent en France dans la région parisienne. Danielle est élevée avec sa sœur Cécile. Son père quitte le foyer en 1960, divorce et part vivre aux États-Unis.

Au début des années 1970, elle fait partie du groupe folk « Grattons Labeur » qui tournent dans l’Orléanais et dans de nombreux cafés-cabarets de Bretagne en compagnie de Gérard Blanchard2. Danielle suit en même temps des cours d’histoire à l’université d’Orléans. Le groupe sort un disque en 1970, Le Bal des sorciers, diffusé sous le label de Môrice Bénin, ABA. Danielle est choriste sur certaines des chansons de Môrice Bénin et aussi sur l’album Gérard Pierron chante Gaston Couté de Gérard Pierron. Mais la jeune femme veut voler de ses propres ailes, quitte le groupe et part sur les routes avec sa guitare et beaucoup d’espoir.

Elle traverse ainsi l’Autriche et la Roumanie, chante dans les rues de Venise et de Vérone. De retour en France, en 1978, elle participe au festival de Castagnède. De retour à Paris à la fin de 1978, elle habite rue de Paradis dans une petite chambre de bonne. Elle chante dans la rue, dans le métro, dans les maisons de jeunes et de la culture. Son ambition la pousse à franchir la porte des cabarets, mais partout, c’est non. Puis fin 1978 elle est engagée à l’Écume pour les fêtes de fin d’année. Elle fait une rencontre déterminante, celle de Eddy Schaff, par l’intermédiaire de Gérard Pierron. Eddy lui fait travailler sa voix en vue d’un enregistrement. Elle affirmera plus tard « Il m’a appris à chanter, m’a véritablement mis le pied à l’étrier, il m’a donné confiance ».

Jean Lavigne lui fait enregistrer son premier disque tiré à mille exemplaires. Elle tente alors un coup de poker : elle invite deux cents personnalités du show-biz, seuls viennent deux journalistes, Jacques Vassal et Maurice Marouani qui la signale à la maison de disques Barclay. Mais son premier disque Il fait soleil ne sort qu’en 1981. Son deuxième album De la main gauche sort l’année suivante, et, la même année, elle rejoint sa sœur Cécile qui vit en Californie. En octobre 1982, elle se produit à l’Olympia dans le cadre des « Olympiades de la chanson ».

En 1984, elle quitte Barclay et signe chez Wea son troisième album Carnaval daté de 1985. Elle participe au Printemps de Bourges et au festival Équinoxe en Bretagne.

En 1985, elle tombe malade, un cancer qu’elle soigne depuis 1983 s’aggrave. Invitée à l’émission Champs Élysées de Michel Drucker le 22 juin, elle prépare l’émission depuis sa chambre d’hôpital, voulant tenir ses engagements à tout prix. Mais, le 13 juin, vaincue par la maladie, Danielle décède3. Elle est enterrée dans le cimetière du Père-Lachaise (57e division), à Paris.

Un an plus tard, Gérard Classe et Georges Nawrocki, des amis de Danielle, décident de sortir l’album souvenir Les Mots, avec des maquettes de studio et des chansons tirées de l’album de 1979, jamais diffusé. Cet album reçoit le grand prix de l’Académie Charles Cros « in Memoriam ».

Danielle Messia a marqué les années 1980 avec des chansons-témoin (Grand-mère ghetto), des chansons prémonitoires (Le Paradis des musiciens), des tableaux intimes (De la main gauche)… Ce parcours d’étoile filante a été accompagné par Eddy Schaaf, musicien qu’on a entendu aux côtés de Allain Leprest ou Jacques Yvart.

Jean-Jacques Goldman lui a dédié sa chanson Famille, il a aussi écrit pour elle la musique de Le temps des enfants.

Discographie /Albums studio

  • 1980 : Danielle Messia (33 tours de 10 titres, Barclay)
  • 1982 : De la main gauche (33 tours de 10 titres, Barclay)
  • 1985 : Carnaval (33 tours de 11 titres, WEA)
  • 1986 : Les mots (33 tours de 11 titres, DGCM)

  • Parmi les multiples interprêtes de « La Main Gauche »