Les 6 et 7 septembre 1980, La Falaise des fous …

C’est à la tête de sa nouvelle compagnie, Les Charmeurs réunis, que Michel Crespin réalise son premier coup d’éclat, « La Falaise des fous ». En 1980, l’espace d’un week-end, il rassemble sur les bords du lac de Chalain, dans le Jura, quelque 70 troupes de jongleurs, bateleurs, équilibristes et autres « performers » de haut vol regroupés sous le titre Les Saltimbanks réunis. Des milliers de spectateurs sont au rendez-vous de ce qui sera considéré comme le manifeste des arts de la rue.

Une vidéo de 3’57« . Source Archives INA

Les 6 et 7 septembre 1980, au bord du lac de Chalain dans le Jura, Michel Crespin organise La Falaise des fous, véritable manifeste d’artistes de rue des années 1970, regroupant plus de deux cents participants fonctionnant en coopérative « Les Saltimbanks réunis » et proposant trente-six heures de mise en scène ininterrompues.

Cet événement est resté dans les mémoires comme un acte fondateur des arts de la rue, témoignant de toutes les pratiques du moment : mime, jonglage, cinéma ambulant, installations éphémères, théâtre et chanson de rue… C’est le point d’étape entre le temps « cogne-trottoir » de la décennie 70 et celui de l’épanouissement, au cours des années 80.

lls mêlent les figures déjà connues, tels le funambule Michel Brachet dit « le diable blanc », Xavier Juillot et ses proliférations aériennes, Jules Cordière et Le Palais des Merveilles ou Le Théâtre de l’Unité de Jacques Livchine et Hervée de Lafond, et ceux qui formeront la seconde génération des arts de la rue, comme Ilotopie qui met en scène un simulacre d’accident et colore le lac en vert fluo.

Un documentaire vidéo de 51’37 » produit par FR3 Bourgogne Franche Comté  à visionner en intégralité sur le site d’Artcena par ici …

 


 » LA FALAISE DES FOUS  » DANS LE JURA
Un article de Mathilde de la Bardonnie publié dans Le Monde du 9 septembre 1980

Il y a toujours dans les foules un enfant égaré. Samedi après-midi, le 6 septembre à Chalain (Jura), une toute petite fille en pleurs criait  » Maman  » dans un micro. Sans dire son nom. Elle déambulait sur la prairie, haut-parleur en main, raccrochée à ce fil que lui avait prêté un préposé à la sonorisation, répétant  » Maman, Maman « . Et cela a fait sourire certains adultes qui ont vu là une image juste des  » mômes de 1980  » : micro en main.

Image. Car ce sont des images que rapportera l’excursionniste, au terme des deux journées de fête proposées suu le

par Les Saltimbanks réunis en l’honneur subit d’un lac de 220 hectares (profondeur 45 mètres) et d’une falaise au-dessus du lac, haute de 75 mètres baptisée pour l’occasion  » Falaise des tous « .

La  » Falaise des tous  » : un titre générique pour  » la plus grande rencontre des Arts de la Rue, regroupant plus de deux cents participants, fonctionnant en coopérative, cirque, funambules, fanfares, musique mécanique, clowns, mimes, équilibristes, plasticiens volants, marionnettes, cinéma ambulant, théâtres, conteurs, chansons, facteurs d’orgues, cracheurs de feu, show musique, bal, barbes à papa, etc. (sic), trente-six heures de mise en scène ininterrompues filmées pat la troisième chaîne de télévision française (re-sic) (et cf. FR 3 Dijon)

Aux chiffres du style : 65 spectacles, chapiteaux, 4 000 entrées à 40 francs nécessaires pour couvrir tout juste les frais de l’opération sans donner rien aux 200 artistes, aux précisions sur le coût du groupe électrogène, la température de l’eau, le nombre des véliplanchistes, on préférera plutôt des images, et le souvenir d’une qualité d’atmosphère exceptionnelle. Il y a eu, de toute façon, beaucoup plus de quatre mille visiteurs.

Était-ce le beau temps d’été, était-ce la couleur turquoise puis rose qu’a prise l’eau du lac mouvante et argentée à l’heure bénie d’après le coucher du soleil ? Était-ce l’humeur résolument détendue, activement décontractée, des responsables du rassemblement, leur côté  » entre copains, on se tutoie d’entrée, on n’est pas là pour s’agresser, même s’il y a de la bagnole sur le parking  » ? (Et il y en avait, de la bagnole). Était-ce la gaieté des chiens qui gambadaient entre les tables de la buvette où les serveurs savaient sourire, ou le bonheur des marmots s’acharnant sur les structures gonflables de conception simple et efficace ? Était-ce la mélancolie des manèges ou celle des airs d’accordéon entendus par-ci par-là et accompagnant notamment la  » chanteuse réaliste  » Annick Hémon …

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