22,50 mètres de haut et 350 tonnes d’acier : « Le Cyclop » est une œuvre sculpturale monumentale qui trône dans les bois de Milly-la-Forêt (Essonne, Île-de-France). Réalisée par Jean Tinguely avec le concours de sa femme Niki de Saint Phalle et de leurs amis artistes, elle abrite un univers surprenant à découvrir au fil d’un parcours labyrinthique . L’année 2025 marque le 100e anniversaire de la naissance de Jean Tinguely …
Aussi appelé « La Tête » ou « Le Monstre dans la forêt », Le Cyclop est avant tout le fruit d’une aventure collective, tissée de liens d’amitié, une utopie réalisée au cours de nombreuses années par « une équipe de sculpteurs fous » réunie autour de la personnalité de Jean Tinguely. Une vidéo de 3’17 » signée en 2022 par ARTE …
Pour visiter le « Cyclop » de Milly-la-Forêt, rendez-vous sur le site internet prévu à cet effet …
Un dossier Grand Format Centenaire édité par les archives de La Radio Télévision Suisse …
On célèbre cette année le 100e anniversaire de la naissance de Jean Tinguely. L’aura de cet artiste né le 22 mai 1925 à Fribourg est internationale. A travers ses machines fantastiques, ses fontaines et des oeuvres parfois monumentales, Jean Tinguely livre une vision du monde où l’humour et l’absurde se mêlent à une critique féroce de la société industrialisée et consumériste de l’après Seconde Guerre mondiale. Retour sur le parcours d’un artiste hors norme à travers le riche patrimoine d’archives conservées à la RTS.
Chapitre 1 : Un artiste et une oeuvre hors norme
Le Cyclop est l’une des dernières oeuvres à laquelle a travaillé Jean Tinguely avant sa mort, survenue en 1991. La construction de cette sculpture gigantesque en forme de tête, installée à Milly-la- Forêt, à une soixantaine de kilomètres de Paris, a débuté en 1969. Des artistes et proches de longue date, comme Nikki de Saint Phalle, Bernhard Lüginbuhl et Daniel Spoerri y ont collaboré. Le Cyclop dit beaucoup de Jean Tinguely : démesure, poésie, acharnement au travail mais aussi sens de l’amitié et goût pour les projets collectifs. En 2022, l’oeuvre-monstre de Tinguely est présentée après une campagne de restauration.
Chapitre 2 : Quand la Suisse romande découvrait Jean Tinguely
Février 1962 : la galerie Bonnier de Lausanne présente une série d’œuvres de Jean Tinguely. La TSR rend compte de cette exposition dans son émission Carrefour. S’il donne à voir les premières « machines à Tinguely » filmées par la télévision romande, le reportage est accompagné d’un commentaire dont les accents goguenards sont symptomatiques de l’incompréhension qu’a pu susciter le travail de l’artiste dans son propre pays.
« Vous êtes sceptique, Monsieur. Et vous, Madame ? Enfin, vous n’allez tout de même pas prétendre ne pas être conquis par cette exposition Tinguely à Lausanne ! »
Carrefour – Publié le 23 février 1962
L’artiste a pourtant déjà acquis une réputation internationale : en 1959, ses Meta-Matics (machines fabriquant des dessins en série) ont fait sensation à Paris. Jean Tinguely a été sélectionné à la Biennale des jeunes artistes et a reçu des félicitations d’André Malraux, alors ministre de la Culture. Toujours en 1959, il réalise une performance dans les jardins du Musée d’art moderne de New York. Il y construit sa machine, Hommage à New York, destinée à s’autodétruire. Au cours d’une soirée mémorable, filmée et photographiée, il met le feu à son chef-d’œuvre.
L’exposition nationale de 1964, qui se tient à Lausanne sera l’occasion pour Tinguely de mieux se faire connaître du public suisse. Son énorme machine, baptisée Heureka, attire tous les regards.
Chapitre 3 : Le parcours de Jean Tinguely
Né à Fribourg, Jean Tinguely va vivre toute son enfance et son adolescence à Bâle. Après une scolarité chaotique, il a fait un apprentissage de décorateur de vitrines. Dans le courant des années 40, il fait la connaissance d’Eva Aeppli, alors étudiante aux Arts décoratifs, qui deviendra sa première épouse. Une rencontre déterminante pour ce jeune homme créatif et révolté, mal compris de sa famille et de son milieu. Jean Tinguely trouvera dans l’art un lieu d’expression de sa singularité.
En 1952, Jean Tinguely et Eva Aeppli s’installent à Paris. Stimulé par ses échanges avec d’autres artistes, il ose, expérimente, cherche sa voie.
Les grands courants qui ont influencé Jean Tinguely
Le « ready made », qui consiste à détourner des objets du quotidien pour les intégrer, de façon souvent provocatrice, à une œuvre d’art, a notamment été développé par un artiste comme Marcel Duchamp. Un autre courant qui va influencer Jean Tinguely est l’art cinétique, qui met le mouvement, et son interaction avec le spectateur, au centre du dispositif artistique. Jean Tinguely admire les mobiles d’Alexander Calder, composés de morceaux de métal colorés, reliés par des éléments de fil de fer, et qui bougent au contact de l’air ambiant.
Le Fribourgeois innove en intégrant dans ses sculptures des systèmes mécaniques ou motorisés complexes qui les animent et les font vivre. Son matériel de prédilection, c’est la ferraille. Il récupère des bouts de métaux, des engrenages, de vieux moteurs, des roues de bicyclettes, pour constituer des machines fabuleuses, poétiques, grotesques, inquiétantes ou comiques.
En 1973, Jean Tinguely évoque ces matériaux avec lesquels il travaille et explique pourquoi il a abandonné les formes d’art plus académiques.
En 1960, aux côtés d’Yves Klein, d’Arman et de son compatriote Daniel Spoerri, Jean Tinguely signe une déclaration donnant naissance au Nouveau Réalisme. Selon les termes de l’historien de l’art Jean Restany, le nouveau réalisme procède d’un « recyclage poétique du réel urbain, industriel, publicitaire ». Une définition dans laquelle les œuvres de Jean Tinguely trouvent un parfait écho. En 1961, Nikki de Saint Phalle, dont Jean Tinguely a fait la connaissance quelques années plus tôt, et qui est devenue sa compagne, rejoint le groupe.