Le premier bouquin de Valérie Lazennec, l’agricultrice bio …

Photo Le Télégramme
Valérie Lazennec, cogérante de la ferme de Traon Bihan à Brest, ne pensait jamais qu’un jour, elle serait paysanne. Pourtant elle est fière de l’être devenue, surtout en Bio. Mais elle n’aurait jamais imaginé non plus devenir un jour « autrice ». Elle vient de lancer officiellement son  1er ouvrage, « CHAPO L’HOSTO », un témoignage sur la méningite et un hommage à l’hôpital. Un portrait à retrouver dans le quotidien Le Télégramme …

« J’ai plein de choses à écrire » : à Brest, l’agricultrice bio devient autrice

Valérie Lazennec, 56 ans ; cogérante de la ferme de Traon Bihan, à Brest, militante infatigable du bio, enfile une nouvelle casquette, inattendue : celle d’autrice, pour parler de la méningite et du handicap invisible. Un article signé Pierre Chapin dans Le Télégramme du 

Valérie Lazennec s’apprête à publier son premier livre et embarque sa fille, Lénaëlle Nicol, dans le Trek Rose Trip, dans le désert du Maroc.
Valérie Lazennec s’apprête à publier son premier livre et embarque sa fille, Lénaëlle Nicol, dans le Trek Rose Trip, dans le désert du Maroc. (Photo Le Télégramme/Pierre Chapin)

Vous vous apprêtez à publier un livre, « Chapeau l’hosto ». Quelle est l’histoire de ce projet ?

Mon fils, Kyrio, notre troisième enfant, a fait une méningite quand il avait 19 mois, en 2007. Il était encore bébé et ne s’en souvient pas. Des années plus tard, je me suis retrouvée à lui raconter ça : tout le monde s’est mis à rigoler, lui surtout, pensant que ce n’était pas vrai. Je me suis rendue compte que j’avais besoin de verbaliser ça et qu’il fallait aussi qu’il connaisse son histoire. Alors j’ai commencé à l’écrire, il y a… sept ans. Je me suis dit que j’allais en faire un livre et l’offrir à mon fils pour ses 18 ans. Bon, finalement, il l’aura pour ses vingt ans !

Qu’est-il arrivé à votre fils, à l’époque ?

C’est parti d’une affection, une otite. On a vu le médecin mais ça a dégénéré. Au point qu’un jour, je l’ai retrouvé raide dans son lit. J’ai tout de suite pensé à la méningite, même si je ne savais pas ce que c’était. J’ai eu ce réflexe : sans doute avais-je déjà entendu que quand on a la méningite, on est raide. Donc j’ai appelé SOS médecin, on a atterri à l’hôpital. Mon fils s’en est bien sorti. Il est resté un mois à l’hôpital et, aujourd’hui, il garde pour séquelle un handicap invisible : il est sourd d’un côté.

Comment avez-vous écrit ce récit ?

Je suis parti sur une forme de journal de bord. L’idée était aussi de faire témoigner les gens proches de cette histoire et qui ont été indispensables dans ce combat, auprès de notre fils mais aussi de la famille. Je voulais aussi sensibiliser à cette maladie, brutale, qui arrive sans qu’on s’y attende et qui peut basculer en quelques heures. Nous, on a eu de la chance, d’autres moins, comme Kyara, qui témoigne dans le livre et a été amputée de ses deux jambes après une méningite. Ce livre, c’est aussi un hommage à l’hôpital, dans un moment où les soignants souffrent aussi. J’ai d’ailleurs invité le professeur Rémi Marianowski, chef de service ORL au CHU, à écrire la préface.

Vous avez laissé une part importante à l’illustration. Pourquoi ?

Je reste comme je suis, donc que du noir et blanc, ça ne m’allait pas ! Mon fils a été pris en charge à l’hôpital Morvan, un joli site que les gens ne connaissent pas vraiment : quand on y va, on est uniquement concentré sur le rendez-vous, la maladie ou le stationnement, mais on ne regarde pas. Alors je voulais le mettre en valeur. La couverture est faite par l’illustratrice Fabienne Léon, qui a aussi un handicap invisible dont elle a fait une force : elle a un problème de vue de naissance et ne peut pas dessiner en relief. Thierry Richard a, lui, fait des photos. Et il y a des dessins, de gens que je connais, et d’autres que je ne connais pas, après un appel lancé sur Facebook.

Vous vous êtes également trouvé une marraine de renom en la personne de Cléopâtre Darleux.

J’ai eu l’occasion de croiser plusieurs fois Cléopâtre, ancienne gardienne internationale du BBH. C’est quelqu’un qui défend les valeurs du bio, du local, qui vient à la ferme. Elle a été ambassadrice, il y a deux ans, de la campagne Bio Réflexe. Et son parcours en tant que femme, son combat pour reconnaître la maternité des sportives professionnelles, et encore après son accident (commotion cérébrale) pour retrouver le plus haut niveau, tout ça me parlait. Elle a répondu oui immédiatement.

Qu’allez-vous faire des recettes du livre ?

L’idée est de récolter des fonds pour permettre d’aider des structures ou contribuer à financer des aménagements pour les familles à l’hôpital. Et une partie ira également à une association des Côtes d’Armor, SpaVer 22, qui accompagne des gens qui ont des maladies chroniques de spondylarthrite, polyarthrite et maladie de Verneuil.

Je suis fière d’avoir réussi. Du coup, je pense qu’il y aura d’autres livres, j’ai plein de choses à écrire.

Vous-mêmes êtes porteuse d’un handicap invisible ?

Oui, j’ai une maladie articulaire chronique. Toutes mes articulations sont touchées, je souffre depuis des années. J’ai longtemps erré avant de mettre un nom dessus. Et je me bats avec le sport et le travail. Je ne lâcherai jamais. Je fais du tennis à la Légion Saint-Pierre et, cette année, je signe dans un club de course à pied. Le sport santé est sans doute ce qu’il y a de mieux face à la maladie, malgré la douleur. Et la prévention par l’alimentation, avec la bio.

Que retenez-vous de cette expérience d’écriture ?

Je suis fière d’avoir réussi. Je n’avais pas de maison d’édition donc j’ai endossé toutes les fonctions : l’aspect juridique, les contrats, la communication, avoir l’imprimeur pour le bon à tirer alors que je suis en train de faire des yaourts… Jai trouvé ça passionnant. Du coup, je pense qu’il y en aura d’autres, j’ai plein de choses à écrire. Sur le combat de la ferme de Traon Bihan ou celui de la maladie chronique, par exemple.


A toutes celles et ceux qui se demandent comment se procurer le  LIVRE

La vente de « CHAPO L’HOSTO » est officiellement lancée sur la plate-forme participative Bretonne « kengo.bzh ».Le 1er défi est de 50, alors n’hésitez plus, foncez l’ACHETER. Une bonne cause à défendre : https://kengo.bzh/projet/5161/chapo-lhosto


Lire par ailleurs : Valérie Lazennec. « À Brest, on lâche pas »

Née dans le béton de Bellevue et épanouie à la campagne, Valérie Lazennec, cogérante de la ferme de Traon Bihan, raconte son Brest à elle. Entre ville et champs, une cité populaire et militante. Un article signé  Pierre Chapin dans Le Télégramme du

Valérie Lazennec, co-gérante de la ferme de Traon Bihan.
Valérie Lazennec, co-gérante de la ferme de Traon Bihan. (Le Télégramme/Pierre Chapin)
Le Brest de votre enfance ?
« Je suis née dans une tour en béton de la Zup de Bellevue, à Kergoat pour être précise. Ma mère était gardienne d’immeuble. J’en ai de super souvenirs, parce que j’y ai côtoyé plein de gens, c’était vraiment riche en échanges. D’ailleurs, j’y ai gardé certaines habitudes : mon médecin, mon pharmacien… Dans ma tête, je ne suis toujours pas de la Rive Droite, je ne connais même pas les rues de Saint-Pierre. C’est là-bas que j’ai eu mes premiers boulots : au centre social de Bellevue, puis au Claj. »C’est quoi Brest ?

« Ce qui me vient à l’esprit, c’est le milieu associatif, très fort, et l’Arsenal, même s’il n’est plus aussi présent qu’avant. C’est ce côté ouvrier et populaire, qui fait sa richesse : Brest doit rester populo, à mon sens, même si on a l’impression qu’on voudrait en faire quelque chose de plus bling-bling, aujourd’hui, alors qu’il faut être fier de ce qu’on est. Et il y a ce tissu associatif hyper fort. Pas mal d’assos ont disparu depuis, comme le Claj. C’est dommage, car eux formaient vraiment la jeunesse, nous mettaient le pied à l’étrier, comme les patros laïque. »

Le petit port de Maison Blanche.
Le petit port de Maison Blanche. (Photo d’archives Le Télégramme)

Un endroit où se balader à Brest ?

« Maison blanche ! C’est comme une île, posée à part. Pour moi, ça représente tout Brest : ces petites cabanes, la mer, l’arsenal, les blockhaus, l’île longue en face, les bateaux, la rade, le goulet… Et l’eau froide ! Moi je suis une terrienne, une vraie, je ne suis pas née avec des nageoires, je flotte plus que je nage. Mais j’ai vraiment besoin de la mer, de la voir, la sentir : ça donne de la force ! Et je dirai aussi Keroual. Au cœur du bois, en zone humide, où il y a une biodiversité exceptionnelle : on a l’impression d’être dans les alpages. On fait de l’écopâturage là-bas, avec nos vaches. On met une cloche à une d’elles, et on se croit en montagne ! »

Pour boire un coup, manger un bout ?
« C’est la limite d’être paysan en ville : on sait que y’a plein de super-trucs, mais on n’a pas le temps d’y aller ! Je dirais le Beaj Café (Saint-Martin), je trouve qu’ils ont réussi à s’inscrire dans l’âme brestoise, et font un gros effort pour proposer de bons produits. J’adore voir les étudiants y passer la journée. Et le Refuge Royal, où on mange super-bien, avec les produits les plus proches. C’est assez courageux de voir ces gens essayer de créer des trucs à Recou, où il y a un super potentiel. Et puis on a la vue sur le pont, la Tour Tanguy, la Penfeld : c’est tout Brest ! »

Une personnalité, un artiste ?
« Irène Frachon : je lui tire mon chapeau. Elle représente parfaitement Brest, dans le combat, le côté tête brûlée, qui lâche pas, même si ça dû être vraiment dur pour elle. C’est un peu mon combat, dans ma filière. Je n’ai jamais eu l’occasion de la rencontrer, mais j’aimerais bien. On a un peu le même type d’ennemis, le chimique qui empoisonne les gens, les lobbies, les politiques… Et je pense qu’on devra se battre toute notre vie.

L’artiste brestosi Nazeem.
L’artiste brestois Nazeem. (Photo d’archives Le Télégramme)

Un artiste, je dirais le graffeur Nazeem. Il est comme moi, monté sur ressort, mais lui a un vrai talent. En 1994, on a travaillé ensemble pour ce qui est l’une des premières fresques officielles brestoises, face au Leclerc, pour le festival Rock sur la Blanche. À l’époque, c’était assez mal vu, assimilé à des dégradations. On a fait du porte-à-porte, pour convaincre et rassurer les gens… On s’est retrouvé il y a quelques mois, parce que je voulais habiller mon camion blanc tout moche. Ça s’est fait en trois minutes, alors qu’on n’avait plus de lien depuis des années, et il m’a fait une fresque superbe… C’est un gars adorable, talentueux, humble comme c’est pas permis. Et il a un rire… Comme moi, même si ça ne va pas, il rigole. Car faut toujours aller de l’avant. »

Un défaut à cette ville ?
« Je l’aime tellement que je ne vois pas. Ou comme partout : il faut vraiment garder le peu de campagne qu’il reste. Brest est un pôle maritime, mais la mer n’existe pas sans la terre : faut arrêter de la grignoter, et faire de la vraie rénovation urbaine, comme ça a été fait aux Capucins. Il y a un potentiel patrimonial dingue à Recouvrance aussi. On voit les vielles façades, mais il faut ouvrir les portes sur les arrière-cours. »

Un jour, quitter Brest ?
« Ah non. À part pour une catastrophe naturelle ou nucléaire. Enfin, si l’île Longue pète, on partira tous vite, et sans valise ! Et puis je ne pourrais pas vivre ailleurs : j’ai trop l’accent brestois ! »