« Il n’y a pas de journalisme d’investigation sans lanceur d’alerte ! » « Splann ! » a fête ses 5 ans d’existence en remerciant ses soutiens
Méthanisation, pollution de l’air, extraction minière… En cinq ans d’existence, ce collectif de journalistes d’investigation – dont France 3 Bretagne est partenaire – a travaillé sur 11 enquêtes au long cours dans la région. Pour remercier donateurs, lecteurs et lanceurs d’alerte, il organisait ce samedi 28 juin une journée de fête et de débat.
Une fête d’anniversaire à guichet fermé. Quelques jours avant l’évènement, il n’y avait aucune place pour participer aux débats, conférence et concert organisés par le collectif de journalistes d’investigation « Splann !« . Une preuve parmi d’autres de l’adhésion du public à ce jeune média déjà bien implanté dans la région.
« Ce sont des sujets qui ne sont pas traités ailleurs« , soutient un fervent lecteur. « Splann ! c’est très local donc ça parle aussi aux gens du coin, de notre commune, s’enthousiasme Maude, lectrice de la première heure. ça donne aussi envie de ne pas être seulement lecteur mais aussi d’agir pour changer les choses au niveau local. »
On veut améliorer la confiance entre journaliste, source et terrain afin qu’on puisse travailler ensemble dans un objectif commun qui est l’information et l’amélioration du débat démocratique. Julie Lallouët – Geffroy Journaliste à « Splann ! »
Un média dont se sont emparés les lecteurs. Et c’est bien cette relation que l’équipe de « Splann ! » entend renforcer :
« Toute personne qui habite en Bretagne est confrontée à ces enjeux qui nous traversent, explique Julie Lallouët – Geffroy, journaliste à « Splann ! ». Par exemple, la méthanisation, on voit tous ces domes qui apparaissent un peu partout. C’est cette relation qu’on veut pouvoir entretenir et améliorer la confiance entre journaliste source et terrain afin qu’on puisse travailler ensemble dans un objectif commun qui est l’information et l’amélioration du débat démocratique. »
Splann !, cela veut dire « clair » en breton. Le pari de ce collectif de journaliste lors de sa création il y a 5 ans ? Mettre en lumière les zones d’ombre bretonnes, à commencer par l’agro-alimentaire.
« On n’aurait jamais dû être là, sourit Pierre-Yves Bulteau, cofondateur et membre du comité éditorial du collectif d’investigation. Splann ! est né d’une réaction sur des actes de censure auprès d’Inès Léraud et de Morgane Large« .
A l’époque, ces deux journalistes sont victimes d’intimidations après des enquêtes parallèles visant le secteur de l’agroalimentaire breton. Inès Léraud est attaquée pour diffamation par Jean Chéritel, un grossiste en fruits et légumes, après une enquête concernant les pratiques managériales et commerciales du groupe et ses démélés judiciaires.
Après sa participation à un documentaire visant la filière avicole dans la région, les roues de la voiture de Morgane Large sont déboulonnées. Elle sera à nouveau victime d’un acte de malveillance similaire deux ans plus tard, en 2023.
On s’est dit « puisqu’il y a un territoire derrière nous, on y va ! »Pierre-Yves Bulteau Cofondateur et membre du comité éditorial de Splann !
Pour dénoncer ces intimidations, en 2020, près de 50 000 personnes dont 320 journalistes signent une pétition « Pour la liberté d’informer sur l’agroalimentaire en Bretagne et ailleurs ».
« C’est une pétition qui nous a dépassé et qui a donné naissance à ce média, témoigne Pierre-Yves Bulteau. On s’est dit puisqu’il y a un territoire derrière nous, on y va ! »
72% du budget basé sur des dons
Cinq ans plus tard, « Splann ! » compte désormais six salariés, une quinzaine de journalistes pigistes et une dizaine de bénévoles. Comme à ses débuts, son modèle économique reste basé sur les dons : en 2024, ils représentaient 72 % des 220 000 € du budget de l’association qui précisé refuser ceux des collectivités.
Une première procédure baillon
Un pari qui semble gagnant. En un an, ces dons ont augmenté de 30 %, preuve d’un public toujours plus solidaire, particulièrement lorsque certains tentent de museler les enquêteurs, comme cette année, où deux journalistes du média ont été visées par une plainte en diffamation après un article sur la filière porcine. « Une procédure-baillon« , selon la rédaction, annulée par la chambre de l’instruction de Rennes mais qui aura tout de même mobilisé deux membres de l’équipe.
« On a pu compter sur plus de 1 000 personnes qui nous ont apportés leur soutien et des dons pour nous permettre de continuer d’enquêter pendant ce temps-là« , raconte Pierre-Yves Bulteau. « A partir du moment où ce média est gratuit, où les informations sont libres d’accès, c’est bien qu’on contribue« , assure un donateur participant à cette journée d’anniversaire.
A l’origine des enquêtes, des lanceurs d’alerte
Cette fête est aussi l’occasion de saluer l’engagement des lanceurs d’alerte à l’origine de ces enquêtes. « Il n’y a pas de journalisme d’investigation s’il n’y a pas d’alertes au départ, témoigne Pierre-Yves Bulteau. C’est à dire des personnes sur leur territoire qui se disent « là il y a un truc qui ne va pas bien, qui nous semble dérangeant mais nous on ne sait pas faire. Le journaliste lui il sait faire. »
Méthanisation, coopératives agricoles, pollution de l’air, exploitation minière… Depuis cinq ans, le collectif de journalistes d’investigation multiplie les enquêtes au long cours et les révélations. La dernière en date concerne la bétonisation du littoral breton.
Et pour faire un don, c’est par ici …