A Landerneau, dans les pas d’Ernest Pignon-Ernest …

Il y a plus de 50 ans, bien avant la vague du street art et alors que le monde de l’art contemporain boudait son coup de crayon toujours politique, Ernest Pignon-Ernest a fait de la rue  l’ossature de ses sérigraphies . Jusqu’au  15 janvier 2023, il nous invite au Fonds Hélène et Edouard Leclerc de Landerneau à marcher dans ses pas à la rencontre de ses lieux, de ses personnages, face à l’Histoire, aux histoires humaines. A ne pas manquer …

Pour vous en convaincre , une vidéo de 2’43 » réalisée par Tébéo pour Le Télégramme …

Exposition présentée à Landerneau du 12 juin 2022 au 15 janvier 2023 …

    • Ernest Pignon-Ernest_© Photo Bruno Paccard_© FHEL, 2022

      «Ce que je fais c’est un peu comme composer un tableau ou réaliser un montage. Ma palette ce sont les lieux, les lieux et leur histoire. Je tente d’en capter, d’en comprendre l’espace, la lumière, la couleur des murs, leurs textures, c’est-à-dire, en peintre et en sculpteur d’appréhender tout ce qui s’y voit. Et simultanément d’en saisir aussi et surtout tout ce qui ne s’y voit pas, ne s’y voit plus: l’histoire, la mémoire enfouie. Mes images naissent de cette investigation et leur insertion dans ces lieux vise à en faire des espaces plastiques et poétiques, et par ce qui est figuré à en révéler, perturber… exacerber le sens et la symbolique, la force suggestive. On a dit souvent que je faisais des œuvres en situation. En fait, je fais œuvre des situations.»
      Ernest Pignon-Ernest

      Pasolini assassiné – Si je reviens. Roma / Trastevere par Ernest Pignon-Ernest

      Pasolini assassiné – Si je reviens. Roma / Trastevere, 2015 Photographie © Ernest Pignon-Ernest © Adagp, Paris, 2022

      Ernest Pignon-Ernest intervient depuis plus de cinquante ans dans l’espace public. Il présente à Landerneau ses installations, ses dessins, ses photographies révélant l’ensemble de son processus de création. L’exposition rassemblant plus de trois cents œuvres manifeste la puissance créative de ce grand artiste, alerté par l’état du monde, soulevé par sa passion pour l’art et la poésie, considéré parfois comme un pionnier de l’art urbain. Apparaît ainsi derrière l’ombre de l’artiste aimé du grand public un créateur complexe admiré par les plus grands penseurs et poètes d’aujourd’hui et longtemps maintenu en retrait des institutions. Ses dessins installés dans les rues des villes du monde semblent naître des murs mêmes où il les a soigneusement placés pour se glisser dans nos vies, sur nos livres, dans notre esprit. Difficile de penser à Rimbaud ou à Pasolini sans qu’immédiatement leurs silhouettes ne s’imposent à nous telles qu’Ernest Pignon-Ernest les interpréta. Ces images sont célèbres car elles sont devenues l’identité la plus familière d’un poète, d’un combat ou d’une situation.

      Écrivains, résistants, mystiques, chefs-d’œuvres du passé collés dans les rues de Naples; victimes à Soweto, Haïti, Grenoble; solitudes à Lyon, à Paris; les collages d’Ernest Pignon-Ernest réalisés souvent dans des situations complexes à Alger, Port au Prince, Ramallah, Avignon sont devenus les images rémanentes des émotions que ces figures ou ces détresses nous inspirent. L’exposition du FHEL est la célébration d’un artiste déjà fameux et dont, militants ou esthètes, artistes de l’art urbain, activistes ou amoureux de la littérature ou de l’histoire de l’art se réclament. En fréquentant son œuvre apparaissent des étapes, des processus, des méthodes, des œuvres moins familières qui révèlent une culture, une pensée, un soin que cette exposition montre en élargissant la connaissance que nous en avions. L’artiste y apparaît en situation: ses installations à l’échelle des lieux, ses œuvres photographiques qui restituent l’émotion que ses collages suscitent, les esquisses et par elles, les processus de décision qui aboutissent à l’apparition de la figure. Ernest Pignon-Ernest, l’artiste que l’on croyait connaitre, longtemps aimé du public et ignoré des institutions, est présenté pour ce qu’il est : profond, complexe, radical, soucieux de l’humain. Il est un artiste et un poète parmi ceux qu’il célèbre.

      Commissariat : Jean de Loisy
      Pratique :
      Exposition Ernest Pignon-Ernest, jusqu’au 15 janvier 2022 au Fonds Hélène et Edouard Leclerc de Landerneau. Ouvert tous les jours, de 10 h à 18 h. Tarif plein : 9 €, tarif réduit : 7 €.


Ernest Pignon-Ernest dans son atelier à La Ruche …

 Il nous ouvre les portes de son atelier à La Ruche et nous fait visiter son exposition aux Ateliers Grognards à Rueil-Malmaison.
Une vidéo Arte TV de 22’41 ». Journaliste : Aldo Lee / Image & son : Diego Monet / Montage : Hermann Michel

 


À Landerneau, quand Ernest Pignon-Ernest croise la Bretagne

Publié par Laurent Aquilo dans Le Télégramme du 24 juillet 2022

Jean de Loisy, commissaire de l’exposition, et Ernest Pignon-Ernest accrochent le portrait de Victor Segalen, peint spécialement pour l’exposition.
Jean de Loisy, commissaire de l’exposition, et Ernest Pignon-Ernest accrochent le portrait de Victor Segalen, peint spécialement pour l’exposition. (Le Télégramme/Laurent Aquilo)

Niçois monté à Paris, Ernest Pignon-Ernest, qui a installé ses œuvres dans le monde entier, a croisé, de loin en loin, le chemin de la Bretagne et des Bretons.

Ernest Pignon Ernest expose en ce moment au Fonds Hélène et Edouard Leclerc, à Landerneau. L’occasion de revenir sur les attaches bretonnes de l’artiste.

  • 1 Landerneau

La ligne TGV entre Paris et Landerneau n’a plus de secret pour Ernest Pignon-Ernest, tout comme le couvent des Capucins, où il est d’abord venu comme amateur d‘art contemporain. « Les plus belles expositions que j’ai vues ces dernières années, je les ai vues là-bas. ?J’ai vu l’exposition Monory, j’étais très ami avec lui, c’est la plus belle expo qu’il ait jamais eue. J’ai vu également les expositions Picasso, Giacometti, Dubuffet… ». Alors, forcément, il était difficile pour le Niçois de refuser la proposition de Michel-Edouard Leclerc d’exposer au Fond Hélène et Édouard Leclerc. « Je suis très honoré que l’on m’ait invité à m’inscrire dans une programmation de cette qualité, dans un lieu aussi beau », expliquait-il avant l’inauguration.

  • 2 Jean Genet

Ami et grand lecteur des poètes, Ernest Pignon-Ernest ne pouvait passer à côté de la figure de Jean Genet. C’est sur le port de commerce de Brest qu’il a magnifié en 2006 le profil de l’auteur de Querelle de Brest, en collant son gisant décroché par deux jeunes hommes, où se mêlent étroitement sensualité et morbidité. Au pied des grues du port, Ernest Pignon-Ernest avait repéré un mur. « Quand je suis arrivé par le train de nuit, j’ai vu que le mur avait été peint. J’ai collé par-dessus, ce qui ne se fait pas ». La rouille et l’air salin sont venus grignoter quelques mois plus tard le papier, renforçant la mystique d’une œuvre iconique, comme le sont ses portraits de Pasolini ou de Rimbaud.

  • 3 Victor Segalen

« Je ne suis pas sûr que ce soit fini », disait-il en souriant lors de l’accrochage. Ernest Pignon-Ernest s’est longtemps interrogé avant de se laisser convaincre de consacrer une salle de l’exposition landernéenne à son travail sur Victor Segalen, commandé spécialement pour l’occasion. Les écrits multiples du médecin, explorateur et poète brestois, décédé à 41 ans et enterré à Huelgoat, ont longtemps travaillé la conscience de l’artiste plasticien. « Je m’interroge sur cette œuvre immense et si diverse, singulière, novatrice et étrangement posthume ». Des questionnements qui se retrouvent dans la fresque consacrée par l’artiste à l’écrivain finistérien.

  • 4 Louison Bobet

Entre la une de Charlie hebdo sur la mort de Reiser et un portrait du poète russe Maïakovski, une photo dédicacée de Louison Bobet.
Entre la une de Charlie hebdo sur la mort de Reiser et un portrait du poète russe Maïakovski, une photo dédicacée de Louison Bobet. (Le Télégramme/Laurent Aquilo)

Que diable vient faire Louison Bobet dans cette atmosphère ? Il faut se pencher un peu attentivement pour voir le portrait du champion cycliste originaire de Saint-Méen-le-Grand, sur les murs des Capucins. Pas une œuvre une photo en noir et blanc, un peu abîmée mais dédicacée de la main du champion breton, qui est punaisée au-dessus de la table de travail d’Ernest Pignon-Ernest, dans un capharnaüm de souvenirs personnels. Cette photo, le jeune Ernest Pignon, excellent footballeur et passionné de vélo, l’avait récupérée adolescent auprès de son idole dans les rues de Nice. Elle ne l’a plus quitté


Retrouvez Ernest Pignon-Ernest par ailleurs sur PrendreParti …

Ça fait 50 ans qu’il colle ses dessins dans les rues …